La météo sans pitié
Les Îles-de-la-madeleine s’effritent rapidement
La perte de terrain sur les Îles-de-laMadeleine s’accélère et une tempête catastrophique comme celle de la semaine dernière vient encore plus bousculer les prévisions.
« Quand une dune disparaît en l’espace de 15 heures, il n’y a plus de prévision ou de statistique qui tienne », constate Serge Bourgeois, directeur de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme aux Îles.
Il cite en exemple une maison construite au bord de la mer qui se trouvait à l’extérieur d’une zone où il y aurait un possible danger d’ici 60 ans. Maintenant, cette résidence pourrait se retrouver à l’eau d’ici cinq ans.
La tempête des 28 et 29 novembre a fait progresser l’érosion des berges. Si bien que les scientifiques y retourneront dans les prochaines semaines pour ajuster leurs calculs.
Plusieurs tempêtes cet automne ont fragilisé les berges. La série noire s’est conclue avec la tempête dévastatrice de la semaine dernière qui a fait disparaître des dunes de sable et fait reculer des terrains de 10 mètres à certains endroits.
« Souvent on voyait un peu de territoire qui se grugeait à chaque tempête, chaque hiver, mais là, ç’a été vraiment des reculs assez importants. Les impacts visuels que ça a eu préoccupent les gens », dit MarieÈve Giroux de l’organisme Attention Fragîles.
SACRIFIER DES SECTEURS
Les changements climatiques font augmenter le niveau de la mer et réduisent le couvert de glace qui protège habituellement les rives. Les tempêtes frappent plus fort et causent plus de dégâts.
Ces dernières années, une vingtaine de résidents ont dû déplacer leurs maisons. Des portions de route sont souvent à risque d’être brisées ou inondées.
Des décisions doivent être prises pour l’avenir des 13 000 insulaires.
« Il y a des choses à faire. Dans 50 ans, les Îles vont être encore là, mais elles vont être modifiées. C’est une question d’adaptation, de gagner du temps et de faire de bonnes interventions », croit M. Bourgeois.
La spécialiste Ursule Boyer-villemaire croit cependant qu’on ne pourra pas protéger l’ensemble des Îles. Il faudra sacrifier certains secteurs des Îles et mettre plus d’énergie sur d’autres.
PAS QUESTION DE DISPARAÎTRE
« Il faut essayer d’accepter qu’il y a des secteurs qu’il faut laisser à la mer pour mieux protéger d’autres secteurs où on met plus de monde au pied carré », estime Mme Boyer-villemaire, professeure associée en géographie à L’UQAM et du Consortium Égide Résilience, risques et catastrophes.
Actuellement, ce que les insulaires voient sur leurs terrains correspond à des reculs plus importants que les scientifiques avaient prévus. Les Îles ne sont toutefois pas menacées de disparition. Une augmentation des taux d’érosion est ainsi prévue d’ici 2060 par rapport aux données historiques mesurées (1963-2008).
« Il y a des noyaux rocheux de plusieurs kilomètres, où vivent la plupart des Madelinots hors de portées des vagues. Le mot disparition, il faut enlever ça du vocabulaire. Modifiées oui, mais pas de disparition », a dit Christian Fraser, agent de recherche au Laboratoire de dynamique et de gestion intégrée des zones côtières de l’université du Québec à Rimouski.