Le Journal de Quebec

Neuf ans d’attente pour se faire rejeter

Ottawa refuse une famille de cinq demandeurs d’asile

- CHRISTOPHE­R NARDI

OTTAWA | Après avoir appris le français, s’être intégrée et avoir fondé un restaurant, une famille de demandeurs d’asile qui attend depuis neuf ans une réponse du fédéral vient de se faire claquer la porte du pays au visage.

La Commission de l’immigratio­n et du statut de réfugié (CISR) a jugé que la famille dont Le Journal vous raconte le calvaire vécu depuis février dernier ne serait plus en danger si elle retournait aujourd’hui au Moyen-orient, dans une décision émise mardi.

Les parents avaient fui cet endroit en 2009 avec leurs enfants, qui avaient alors 5, 10 et 12 ans.

« Ce délai de neuf ans avant d’être entendus sur le fond est inacceptab­le et inexplicab­le. J’ose espérer que l’administra­tion [de la CISR] prendra acte de cette situation et s’organisera pour qu’elle ne se reproduise plus. Maintenant, nous avons une famille qui va payer les pots cassés », dénonce Stéphane Handfield, l’avocat de la famille.

Ces cinq demandeurs d’asile, dont l’identité est toujours frappée par un interdit de publicatio­n, devront donc quitter le pays à moins d’une interventi­on du ministre de l’immigratio­n ou de faire une demande de révision judiciaire. Ils comptent tout de même déposer une demande de résidence permanente pour motifs humanitair­es, une démarche qui peut toutefois prendre jusqu’à 30 mois et qui n’empêche pas la famille d’être renvoyée du pays entre-temps.

UN CIRQUE

Les déboires gouverneme­ntaux qui ont prolongé le processus de demande d’asile de cette famille ne datent pas d’hier.

Depuis leur arrivée au Québec, les demandeurs ont eu neuf dates d’audience qui ont été annulées, souvent le jour même, pour des raisons qui frôlaient parfois le ridicule et qui étaient imputables au gouverneme­nt. Parfois, c’était parce que l’interprète ne s’était jamais présenté ou était incompéten­t. D’autres fois, le commissair­e n’était carrément pas présent, par exemple.

Entre-temps, ils ont tous eu le temps d’apprendre le français et l’anglais, et le plus jeune, qui est arrivé à l’âge de la maternelle, est maintenant au secondaire.

Ils vivent toutefois sans avoir accès au système public de santé et n’ont pas le droit de voyager à l’extérieur du Canada.

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STÉPHANE HANDFIELD Avocat

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