Grosse baisse des vasectomies depuis qu’elles sont gratuites
Des patients vont au privé en raison des listes d’attente du public
Le nombre de vasectomies faites dans le réseau public a chuté de près de 40 % en trois ans au Québec. En raison des longues listes d’attente, plusieurs patients ont préféré payer des centaines de dollars au privé.
« Moi, ça m’inquiète, réagit le Dr Michel Labrecque, un médecin de famille pionnier de la vasectomie au Québec. Ça a baissé de façon importante. »
Selon les données de la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ), 11 292 vasectomies ont été remboursées en 2017. Il s’agit d’une baisse de 38 % par rapport à 2014. ( Voir tableau.)
Chirurgie souvent effectuée en clinique, la vasectomie est pratiquée par des médecins de famille et des urologues. Selon l’association des urologues du Québec, cette baisse est attribuable à la fin des frais accessoires en janvier 2017 (qui privait les médecins d’un revenu).
« Avec tout ce qui s’est passé, plusieurs qui en faisaient en cabinet étaient dans un flou et ont arrêté d’en faire », souligne le président de l’association, le Dr Steven P. Lapointe.
SYSTÈME À DEUX VITESSES
En 2017, 99 urologues ont fait des vasectomies. C’est 11 de moins qu’en 2014 (-10 %). Pendant ce temps, l’attente au public s’est allongée, notent plusieurs médecins.
Résultat : des patients se sont tournés vers le privé, où le délai est court, mais à fort prix. En quelques appels, Le Journal a constaté que l’attente au public se compte souvent en mois, voire plus d’un an. Souvent, on ne peut même pas garantir une date.
À l’inverse, on peut obtenir un rendez-vous en quelques jours au privé, moyennant 275 $ à 950 $.
Or, puisque les données du régime privé ne sont pas comptabilisées, il est impossible de savoir si ce nombre de chirurgies est en hausse. Selon le Dr Labrecque, la fin des frais accessoires a créé un système « à double vitesse ».
« C’est deux mondes pour quelque chose qui normalement devrait être gratuit », déplore celui qui travaille à Québec.
« L’accessibilité n’est presque plus là », croit aussi le Dr Nicolas Nélisse, qui reçoit environ 3000 demandes par an, pour 1000 places.
Pour ce médecin de Montréal, l’attente a doublé depuis deux ans (de trois à six mois).
PLUS D’ATTENTE
« Il y a toujours eu une attente, mais là, c’est plus important, avouet-il. Et il y a certainement plus de patients qui vont au privé », dit-il.
Par ailleurs, des médecins du public disent se faire demander chaque semaine « combien ça coûte », par des patients.
« C’est comme si le message n’avait pas passé que c’est gratuit », dit le Dr Labrecque.