Le village de Rivière-à-pierre se bat pour son avenir
La municipalité est accablée par un manque de main-d’oeuvre et l’exil des résidents
La pénurie de main-d’oeuvre frappe de plein fouet la municipalité de Rivière-à-pierre, dans le comté de Portneuf, où chaque entreprise cherche désespérément du personnel, et les résidents quittent ce village qui devient fantôme.
Le petit village de 600 âmes était désert lors du passage du Journal, mardi, alors que seuls deux chevreuils ont été aperçus traversant la route qui sillonne l’endroit. « C’est extrémiste, mais Murdochville, avec les mines, était une ville prospère et maintenant c’est un village fantôme, on ne veut pas se rendre là », s’inquiète l’agente de développement pour la municipalité de Rivière-à-pierre, Marie-christine Morasse.
Les dirigeants d’entreprises rencontrés ne s’en cachent pas : recruter du personnel est un défi de taille depuis un an et la situation est loin de s’améliorer. Le propriétaire du moulin à scie Goyette Adélard et Fils a été forcé d’arrêter totalement la production du moulin pendant une journée et demie la semaine dernière, faute d’employés. Or, c’est la deuxième fois que pareille situation se produit cet automne. « C’est 400 $ de l’heure pour le personnel, plus les revenus qu’on n’a pas. Ça commence à menotter pas mal », précise Daniel Tremblay, qui ne veut pas chiffrer davantage les pertes encourues. Il ne lui manque que deux employés sur 26, mais il doit composer presque tous les jours avec des absences ou des démissions sans préavis.
DES DIZAINES DE POSTES À POURVOIR
Qui plus est, la population est vieillissante en raison d’un exode des jeunes, et les employés potentiels qui proviennent de l’extérieur se ravisent souvent une fois arrivés à destination. « Les gens nous envoient leur CV, et quand ils voient que c’est à Rivière-àPierre, ils nous disent que ce n’est pas pour eux », confirme Mathieu Bergeron, directeur de production chez Polycor, une entreprise spécialisée dans le granite.
M. Bergeron devra pourvoir plus d’une vingtaine de postes pour la haute saison, cet été, et il avoue que le défi est de taille. Si la pénurie affecte la province, des petits villages comme celui de Rivière-à-pierre peinent encore plus à tirer leur épingle du jeu. Les entreprises n’ont d’autres choix que de mettre en place des opérations séduction afin de se démarquer, d’attirer et de retenir le personnel.
Des augmentations de salaire, des horaires flexibles, des primes de rendement et de référencement figurent parmi les incitatifs ( voir encadrés).
PAS DE CELLULAIRE
La mairesse, Andrée Saint-laurent, reconnaît que la situation se dégrade d’année en année. Près d’une dizaine de commerces ont fermé leurs portes depuis 10 ans.
L’éloignement y est pour beaucoup, selon elle, mais aussi le fait que le petit village n’a aucun service de téléphonie cellulaire, ce qui le déconnecte du reste du monde. « On nous a dit qu’on n’est pas assez rentables, qu’on n’a pas assez de population », confie-t-elle.
Les élus font du dossier leur cheval de bataille depuis 20 ans, notamment pour une question de sécurité, car le village vit de l’industrie de la chasse et de la pêche.
Le député conservateur Joël Godin soutient qu’il est urgent d’agir.
« Est-ce attrayant d’aller vivre et travailler dans un secteur où il n’y a même pas internet haute vitesse ? On est en 2018, ce n’est pas un luxe, c’est essentiel », dit-il.