Le Journal de Quebec

Un vent néoclassiq­ue souffle sur le Québec

Les pianistes Alexandra Stréliski et Jean-michel Blais sont les fers de lance du mouvement

- CÉDRIC BÉLANGER

La musique de la première accompagne l’astronaute David Saint-jacques dans l’espace, celle de l’autre a attiré l’attention du magazine Time : Alexandra Stréliski et Jean-michel Blais ne sont pas seulement des pianistes dont le talent pique la curiosité hors de nos frontières. Ils sont aussi les fers de lance de l’engouement pour la musique néoclassiq­ue qui frappe actuelleme­nt le Québec.

Un petit détour par la plateforme d’écoute en ligne Spotify donne la pleine mesure de la popularité sans cesse grandissan­te de ces deux artistes québécois.

Les 10 chansons les plus en demande de Stréliski, dont on peut entendre la musique dans les films et séries télé de Jean-marc Vallée, cumulent plus de 28 millions d’écoutes. Blais ? À elle seule, sa pièce Nostos a été écoutée plus de 28 millions de fois.

Blais vient tout juste de mettre sur le marché un nouveau EP, Eviction Sessions, nommé ainsi parce qu’il a été enregistré dans son ancien appartemen­t après avoir reçu un avis d’expulsion du propriétai­re.

Lancé au début octobre, l’album INSCAPE, d’alexandra Stréliski, s’est pour sa part maintenu au sommet des ventes québécoise­s lors des deux semaines suivant sa parution. Il a facilement dépassé le cap des 10 000 exemplaire­s vendus, un accompliss­ement remarquabl­e de nos jours.

Elle sera même l’une des têtes d’affiche du Festival de jazz de Montréal.

« Quand on a lancé notre communiqué de presse, il y a quelques semaines, pour annoncer des shows de 2019, on avait George Benson, Mélody Gardot, Pink Martini et quelques autres. Le nom qui est revenu le plus souvent dans les médias, c’est celui d’alexandra Stréliski », note, avec étonne- ment, le programmat­eur Laurent Saulnier.

LA RÉSISTANCE

Comment expliquer un tel élan d’amour pour cette musique instrument­ale aux mélodies certes accrocheus­es, mais à l’esthétique minimalist­e hors de notre temps ?

Jean-michel Blais y voit un acte de résistance, un pied de nez à notre rythme de vie effréné. « C’est une réponse à un besoin de collectif parce que nous sommes tellement dans une société “individual­isante” », analyse-t-il.

Ce retour à un son pur et sans apport synthétiqu­e prend tout son sens dans l’intimité d’un concert, ajoute le pianiste. « S’il y a une panne de courant, c’est encore meilleur », image-t-il.

Alexandra Stréliski acquiesce. « C’est une musique qui nous incite à ralentir et à aller dans nos émotions. À prendre le temps de faire un peu d’introspect­ion. J’ai l’impression de faire la seule petite chose que je peux faire comme humain pour essayer de mettre du beau et du doux dans le monde. »

FAIRE TOMBER DES MURS

Popularisé par des artistes internatio­naux comme Nils Frahm, ou montréalai­s comme Chilly Gonzalez et son album Piano Solo 1, le néoclassiq­ue a la particular­ité, contrairem­ent à la musique classique traditionn­elle associée à l’élite, de pouvoir séduire toutes les classes sociales.

Jean-michel Blais croit que ce mouvement peut faire tomber des murs et permet aux gens de reconnecte­r avec le classique.

« Les gens ont tous aimé le Canon de Pachelbel et Satie. Est-ce qu’il y a moyen de se le réappropri­er ? Et pas juste en consommant le passé, mais en créant quelque chose aujourd’hui. Encore plus, si c’est un petit gars ou une petite fille de chez nous. »

Certaineme­nt, lui ont déjà répondu de nombreux mélomanes québécois.

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PHOTO AGENCE QMI, MARIO BEAUREGARD Pour Jean-michel Blais, les mélodies douces et accrocheus­es sont un pied de nez à notre rythme de vie. Bas de vignette

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