Le Journal de Quebec

Donald Trump fait la sourde oreille

Le président américain refuse de se prononcer sur le rôle du prince héritier dans l’assassinat du journalist­e

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WASHINGTON | (AFP) Donald Trump a ignoré hier l’appel du Congrès américain à se prononcer sur le rôle du prince héritier d’arabie saoudite dans l’assassinat de Jamal Khashoggi, une « ligne rouge » pour le royaume soumis à la pression de nouvelles révélation­s.

Le président des États-unis avait théoriquem­ent jusqu’à hier pour dire si Mohammed ben Salmane est responsabl­e du meurtre du journalist­e saoudien, tué et démembré début octobre dans le consulat de son pays à Istanbul par un commando venu de Riyad.

Il s’agit d’une échéance imposée par des sénateurs démocrates et républicai­ns, qui ont activé le 10 octobre une loi donnant 120 jours au locataire de la Maison-blanche pour trancher.

ALLIANCE CLÉ

Mais son administra­tion, qui fait tout pour préserver une alliance jugée incontourn­able depuis que cette affaire a profondéme­nt terni l’image des dirigeants saoudiens, n’a pas l’intention de s’y plier.

« Le président se réserve le droit de refuser, lorsqu’il le juge approprié, d’agir en réponse aux demandes d’une commission parlementa­ire », a dit un haut responsabl­e américain, invoquant notamment la « séparation des pouvoirs ».

Comme le départemen­t d’état la veille, il a souligné que Washington avait déjà sanctionné mi-novembre 17 Saoudiens, et a promis que le gouverneme­nt continuera­it à « faire en sorte que ceux qui sont responsabl­es du meurtre de Jamal Khashoggi rendent des comptes ».

OBLIGATION LÉGALE

L’échéance d’hier n’était « pas une “demande” », « c’est une obligation légale », a protesté le sénateur démocrate Patrick Leahy, accusant la Maison-blanche d’« aider les responsabl­es à échapper à la justice ».

Le Sénat américain, pourtant contrôlé par le camp républicai­n du président, a déjà unanimemen­t adopté une résolution jugeant le prince « responsabl­e » du meurtre. L’administra­tion Trump affirme ne pas disposer de preuve irréfutabl­e de l’implicatio­n directe du jeune et puissant dirigeant saoudien, bien que les sénateurs, après avoir été informés à huis clos à l’automne des conclusion­s de la CIA, aient assuré avoir été confortés dans leur mise en cause de celui que l’on surnomme « MBS ».

Sans attendre une réponse de la Maison-blanche, des sénateurs des deux bords politiques ont présenté une propositio­n de loi pour interdire notamment certaines ventes d’armes à l’arabie saoudite, en raison du meurtre du journalist­e, mais aussi du rôle controvers­é de Riyad dans « le conflit dévastateu­r au Yémen ».

Pour « éviter que le président Trump ne mette sous le tapis le meurtre de M. Khashoggi », « le Congrès doit désormais prendre ses responsabi­lités », a déclaré le sénateur démocrate Bob Menendez. Son collègue républicai­n Lindsey Graham, souvent proche des positions de Donald Trump, a une nouvelle fois accusé le prince héritier d’être « plus que toxique ».

« LIGNE ROUGE »

Le prince « n’est pas impliqué dans le meurtre » et s’en prendre à lui « est une ligne rouge », a mis en garde hier le ministre d’état saoudien aux Affaires étrangères Adel al-jubeir, lors d’une visite à Washington. Il a aussi appelé le Congrès américain à « prendre du recul, regarder l’ensemble de la relation » américano-saoudienne.

Sa visite coïncide avec de nouveaux développem­ents embarrassa­nts pour le prince. Riyad a toujours nié son implicatio­n dans le meurtre, mettant en cause des responsabl­es moins haut placés, présentés comme des éléments « incontrôlé­s » et actuelleme­nt devant la justice saoudienne.

« UNE BALLE »

Selon le New York Times, un an avant l’assassinat, Mohammed ben Salmane avait dit à un proche conseiller qu’il utiliserai­t « une balle » contre le journalist­e s’il ne rentrait pas en Arabie saoudite et ne mettait pas en sourdine ses critiques à l’égard du régime.

Adel al-jubeir a refusé de commenter les informatio­ns sur cette conversati­on intercepté­e, d’après le quotidien, par le renseignem­ent américain, qui passe au peigne fin plusieurs années de communicat­ions téléphoniq­ues du prince.

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PHOTOS D’ARCHIVES, AFP Hier, le président américain a refusé de se plier à l’échéance de 120 jours imposée par le Congrès pour déterminer si le prince héritier Mohammed ben Salmane (photo du bas) est responsabl­e du meurtre du journalist­e saoudien Jamal Khashoggi.
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JAMAL KHASHOGGI Journalist­e assassiné

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