Le Journal de Quebec

La lettre en version intégrale

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QUE RESTE-T-IL APRÈS DIX ANS?

Dix années à continuer de te chercher et d’espérer te retrouver. Espérer aussi que tu sois bien où tu es. Mais où es-tu ? Voilà la vraie question, mais quelle est la réponse ? Combien de temps encore va-t-il se passer sans te revoir ? Comment va-t-on faire pour continuer sans toi à nos côtés ? Qui détient l’informatio­n nécessaire et importante pour nous aider à te retrouver ? Toutes ces questions, je me les pose depuis dix ans. C’est impossible que toi, un petit jeune homme de 14 ans, tu aies pu réussir à te faufiler parmi tous ces gens qui te cherchaien­t, sans l’aide de personne. Il y a quelqu’un qui, peut-être sans le vouloir ou sans savoir que tu étais en fugue et recherché, t’a embarqué dans son auto ou son camion. Ou tout simplement vu marcher je ne sais où. Pourquoi n’avons-nous pas l’informatio­n importante et nécessaire pour te retrouver ?

Que reste-t-il de ces 14 années avec toi ? Des beaux souvenirs à te voir rire et sourire. Cuisiner, décorer, aider les autres, jardiner, travailler. Aimer la musique, les fêtes, le camping, et que dire de ta façon de monter ta tente. Nous étions tous surpris de constater qu’il n’y manquait rien à l’intérieur. Tellement que ta soeuraimai­t maintenant mieux dormir dans la tente avec toi. Tout un exploit, mais faut dire que tu lui avais fait un nid assez douillet et confortabl­e. Et tout ça malgré ta souffrance intérieure. Pourquoi un jeune homme aussi attachant que toi n’a pas réussi à se faire un seul ami avec qui partager, s’amuser, parler, un seul avec qui tu aurais pu livrer ta souffrance ? Ça t’aurait grandement aidé et, fort probable, tu n’en serais pas rendu là. Tu serais sûrement encore avec nous.

J’espère que ceux qui t’ont intimidé constatent le mal qu’ils t’ont fait, le mal qu’ils nous ont également fait.

Et maintenant, on se doit de continuer. Garder espoir… Garder force et courage… J’avoue que j’ai peur… Peur de ne plus être capable d’avancer… D’échouer ce combat, oui, un combat pour survivre à cette trop grande épreuve. Je suis faible, comparée à toi qui as tant souffert d’être rejeté des autres. Tu as su garder ton beau grand sourire jusqu’à ton départ pour la maison. C’est cette image qui me revient toujours. Te voir au pied de l’escalier avec ton beau grand sourire. Je t’aime, mon fils, et tu me manques tellement, je dirais même plus qu’avant. J’espère tant que tu sois bien là où tu es. Que ton coeurne souffreplu­s. Que tu sois enfin libre de respirer la vie, une belle vie. Te savoir enfin heureux, cela me soulagerai­t un peu. En attendant d’avoir toutes ces réponses… je garde confiance en la vie… Je garde espoir de te retrouver… Et je veux que tu saches que toujours je t’attendrai, que je t’aimerai comme au premier jour où tu es arrivée dans ma vie, dans mes bras. Nous t’attendons tous avec tout l’amour que nous avons pour toi. On continue à t’attendre, mon amour. Maman xxxx

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