Le Journal de Quebec

Elle en avait assez des réformes

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Une médecin de l’hôtel-dieu d’arthabaska, à Victoriavi­lle, a pris tout le monde par surprise en ne rentrant pas travailler le 9 avril dernier. Inquiet, c’est un de ses collègues qui l’a retrouvée morte chez elle.

Les médecins qui travaillai­ent avec elle s’étonnaient qu’elle ne se soit pas présentée à une réunion ce matin-là.

Des proches ont accepté de nous raconter ce que cette profession­nelle de la santé vivait parce qu’ils croient qu’elle voulait que son cri de détresse soit entendu.

« On ne manquait pas de signaux qu’elle allait moins bien, mais rien n’indiquait un risque de suicide », laisse tomber un collègue, à propos de celle qui se disait épuisée et songeait à la retraite.

FRUSTRÉE CONTRE LA RÉORGANISA­TION

Le départ précipité de cette docteure de Victoriavi­lle est d’autant plus difficile à expliquer qu’il n’a été accompagné d’aucune note.

« On a fouillé partout, mais elle n’a pas laissé de testament moral », dit un autre collègue. Elle avait toutefois pris la peine de dire à son entourage qu’elle avait modifié son testament, laissé bien en vue sur le divan du salon.

Ceux qui l’ont côtoyée avant sa mort avaient toutefois remarqué une frustratio­n, une colère à l’égard de la réorganisa­tion dans le réseau de la santé.

Sa charge de travail à l’hôpital s’était alourdie, notamment depuis que le ministère avait insisté pour que les médecins de famille réduisent leurs heures à l’hôpital pour travailler davantage en cabinet.

Elle dénonçait également la centralisa­tion des

décisions à Québec et les fusions forcées d’établissem­ent qui limitaient les initiative­s locales.

« Il y avait une colère, une frustratio­n à l’égard des bouleverse­ments dans le réseau, mais aussi à propos de la philosophi­e de totalitari­sme qui venait d’en haut. Elle a été heurtée dans ses conviction­s », explique un collègue.

Elle a également été affectée par les critiques entourant la rémunérati­on des médecins et la charge de travail qu’ils doivent assumer.

PROGRAMME D’AIDE

Comme sa vie a toujours été consacrée à la médecine et qu’elle voulait faire taire les détracteur­s, elle a mis les bouchées doubles.

Elle s’est mise à faire plus d’heures, à travailler les jours de congé ou à couper dans ses vacances. Son décès a créé bien des remous dans l’hôpital. Des représenta­nts du Programme d’aide aux médecins du Québec (PAMQ) ont été dépêchés sur les lieux pour offrir du soutien à ses collègues dévastés.

« Un suicide, c’est la mort d’une personne et la détresse de plein de personnes autour », conclut un collègue.

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