Le contenu d’un navire, un service essentiel ?
Les débardeurs syndiqués du Port de Montréal et leur employeur sont en conflit depuis plusieurs semaines
En plein conflit de travail, les débardeurs du port de Montréal et leur employeur se retrouvent devant le Conseil canadien des relations industrielles afin de déterminer si charger et décharger le contenu de navires constitue un service essentiel.
La convention collective des débardeurs est échue depuis le 31 décembre, et ils disposent d’un mandat de grève. Mais ils ne peuvent en faire usage, car l’employeur tente de faire déclarer leur travail comme un service essentiel.
Ce « conflit dans le conflit » signifie également que la partie patronale ne peut pas décréter de lock-out, tant et aussi longtemps que le Conseil n’a pas rendu sa décision.
« Les services essentiels, c’est pour ce qui doit être en place pour assurer [la santé et la sécurité] de la population. Il doit y avoir un danger éminent », affirme Michel Murray, le porte-parole du Syndicat canadien de la fonction publique, auquel est affilié le Syndicat des débardeurs de Montréal.
« Et nous on ne pense pas que de vider un container d’articles de Dollarama, de chez IKEA, ou du vin et du fromage provenant de France, c’est quelque chose qui représente une urgence nationale. »
L’association des employeurs maritimes représente les intervenants du milieu maritime des ports de Montréal, Trois-rivières/bécancour, Hamilton et Toronto, incluant des propriétaires, exploitants et agents de navires ainsi que des entreprises d’arrimage.
En octobre, elle s’est tournée vers le Conseil canadien des relations industrielles pour déterminer si les débardeurs effectuent un travail essentiel.
CRITIQUES ?
Ils font valoir que tous les jours, d’énormes quantités de médicaments critiques pour la santé des Canadiens transitent par le port de Montréal, et que l’interruption du travail pour une durée indéterminée pourrait avoir des conséquences désastreuses sur le système de santé, partout au pays.
D’autres matières j ugées cruciales par l’association, comme le sel répandu sur les trottoirs des grandes villes canadiennes en plein hiver pour assurer la sécurité des piétons, passent par le port.
Ils ont aussi fait valoir que certaines denrées pourraient disparaître des rayons des épiceries, et que les conséquences pour l’industrie agricole pourraient elles aussi être graves.
M. Murray réplique qu’en cas de grève, ces matières pourraient être acheminées dans d’autres ports du pays.
« On a aussi dit qu’on est prêts à fournir un service pour la santé et la sécurité, notamment pour la population de TerreNeuve, parce que le seul fournisseur portuaire de l’île passe par notre port. On s’assurerait que ces bateaux reçoivent les services nécessaires », plaide-t-il.
En 2010, le Conseil avait d’ailleurs tranché que les services rendus à la population de Terre-neuve par le port de Montréal étaient essentiels.
« On n’est pas contre certains services essentiels, on fait simplement valoir que ce ne sont pas 100 % des services qui le sont », affirme le représentant syndical.
SILENCE CHEZ L’EMPLOYEUR
L’association des employeurs maritimes n’a pas retourné les appels du Journal, hier.
Le Conseil canadien des relations industrielles a prévu de nombreuses autres audiences, puisque l’association aurait convoqué près d’une vingtaine de témoins. La décision pourrait être rendue en mars.
À la base, les négociations difficiles s’expliquaient par les salaires et l’organisation du travail, les salariés devant être disponibles pour travailler 19 jours sur 21 à l’heure actuelle.