Une défense plus ardue à invoquer
« L’affaire Turcotte » a mis sous les projecteurs la notion de non-responsabilité criminelle, si bien qu’il est désormais plus ardu de présenter une telle défense.
« C’est clair que cette affaire a eu des répercussions. Les perceptions ont changé. Ça semble plus difficile d’obtenir un acquittement pour cause de troubles mentaux », estime la présidente de l’association des avocats de la défense, Mia Manocchio.
Avant ce procès, les tribunaux rendaient des verdicts de non-responsabilité criminelle, mais c’était moins connu.
« Ça s’appelait l’aliénation mentale, on en avait tous les jours, explique la juge retraitée Nicole Gibeault. Avec le procès de Guy Turcotte, tout le Québec a appris que ça existait. Le premier verdict a ébranlé tout le monde. Ça a vraiment mis la confiance du public envers la justice au tapis. »
Ce premier verdict renversé par la Cour d’appel a « mis un frein » à ce type de défense, signale l’ex-magistrate.
Me Manocchio observe que des psychiatres sont maintenant réticents à produire des expertises qui seront scrutées sous la loupe médiatique.
Et les jurés semblent aussi plus difficiles à convaincre.
« Il y a eu cette impression que les jurés avaient des préjugés face à cette défense, indique la criminaliste Alexandra Longueville. Mais un jury est toujours instruit par le juge, il faut lui faire confiance. »
L’ex-juge Gibeault donne l’exemple de Luka Rocco Magnotta, auteur du meurtre de l’étudiant chinois Jun Lin, en 2012.
PROFITER DE LA DÉFENSE
« Tout le monde semblait dire : en voilà un autre qui veut profiter de cette défense. Mais il a été déclaré coupable. Ça a rappelé qu’on peut être un fou furieux tout en étant conscient de ses gestes », rappelle-t-elle.
L’affaire Turcotte a également mis en lumière la question de l’indemnisation des victimes d’actes criminels, dit Nancy Roy, directrice générale de l’association des familles de personnes assassinées ou disparues [AFPAD].
« Isabelle a chamboulé la façon de voir les victimes et leurs proches, expliquet-elle. Le public a réalisé à quel point il y avait peu d’indemnisations pour les parents de victimes. Elle fait partie de celles qui ont fait avancer la cause. »
« Les victimes ne devraient pas avoir à prouver qu’elles sont victimes, ça devrait être le contraire, dit-elle. Pour L’IVAC, si une victime va bien par moments, c’est qu’elle n’a plus besoin d’aide. Alors qu’au contraire, les victimes devraient avoir le droit de rire. »