Le Journal de Quebec

Une défense plus ardue à invoquer

- MICHAËL NGUYEN

« L’affaire Turcotte » a mis sous les projecteur­s la notion de non-responsabi­lité criminelle, si bien qu’il est désormais plus ardu de présenter une telle défense.

« C’est clair que cette affaire a eu des répercussi­ons. Les perception­s ont changé. Ça semble plus difficile d’obtenir un acquitteme­nt pour cause de troubles mentaux », estime la présidente de l’associatio­n des avocats de la défense, Mia Manocchio.

Avant ce procès, les tribunaux rendaient des verdicts de non-responsabi­lité criminelle, mais c’était moins connu.

« Ça s’appelait l’aliénation mentale, on en avait tous les jours, explique la juge retraitée Nicole Gibeault. Avec le procès de Guy Turcotte, tout le Québec a appris que ça existait. Le premier verdict a ébranlé tout le monde. Ça a vraiment mis la confiance du public envers la justice au tapis. »

Ce premier verdict renversé par la Cour d’appel a « mis un frein » à ce type de défense, signale l’ex-magistrate.

Me Manocchio observe que des psychiatre­s sont maintenant réticents à produire des expertises qui seront scrutées sous la loupe médiatique.

Et les jurés semblent aussi plus difficiles à convaincre.

« Il y a eu cette impression que les jurés avaient des préjugés face à cette défense, indique la criminalis­te Alexandra Longuevill­e. Mais un jury est toujours instruit par le juge, il faut lui faire confiance. »

L’ex-juge Gibeault donne l’exemple de Luka Rocco Magnotta, auteur du meurtre de l’étudiant chinois Jun Lin, en 2012.

PROFITER DE LA DÉFENSE

« Tout le monde semblait dire : en voilà un autre qui veut profiter de cette défense. Mais il a été déclaré coupable. Ça a rappelé qu’on peut être un fou furieux tout en étant conscient de ses gestes », rappelle-t-elle.

L’affaire Turcotte a également mis en lumière la question de l’indemnisat­ion des victimes d’actes criminels, dit Nancy Roy, directrice générale de l’associatio­n des familles de personnes assassinée­s ou disparues [AFPAD].

« Isabelle a chamboulé la façon de voir les victimes et leurs proches, expliquet-elle. Le public a réalisé à quel point il y avait peu d’indemnisat­ions pour les parents de victimes. Elle fait partie de celles qui ont fait avancer la cause. »

« Les victimes ne devraient pas avoir à prouver qu’elles sont victimes, ça devrait être le contraire, dit-elle. Pour L’IVAC, si une victime va bien par moments, c’est qu’elle n’a plus besoin d’aide. Alors qu’au contraire, les victimes devraient avoir le droit de rire. »

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