Le Journal de Quebec

Vite, au secours, Monsieur Mulroney !

- GUY FOURNIER guy.fournier @quebecorme­dia.com

Au Canada, pour ne pas dire en Amérique du Nord, la culture française dépend pour une bonne part de Radio-canada, du Conseil des Arts, de Téléfilm, de l’office national du film et du Fonds des médias.

Bon an mal an, ces organismes investisse­nt plus de 800 millions de dollars en télévision, en cinéma, en théâtre et en littératur­e de langue française. L’acharnemen­t séculaire des Québécois et des francophon­es hors Québec a fait en sorte qu’au moins le tiers de leurs budgets est attribué à notre culture.

La constituti­on que le Québec n’a toujours pas signée ne garantit pas ce partage. L’accord du lac Meech aurait pu couler dans le bronze le statut du Québec comme société distincte, mais la courageuse entente négociée à bout de bras par l’ancien premier ministre Brian Mulroney ne mentionnai­t pas que le partage des subvention­s devait être d’un tiers pour les francophon­es et des deux tiers pour les autres.

ON A VEILLÉ AU GRAIN

Si le partage a fini par s’établir de cette façon, c’est que nos parlementa­ires francophon­es ont veillé au grain et tapé sur la table, malgré ce que pensent les sceptiques. Leur point de vue était conforté par les statistiqu­es démographi­ques et le concept de deux peuples fondateurs. Très à la mode au moment du centenaire de la Confédérat­ion, puis à l’époque où Pierre-elliott Trudeau, Jean Marchand et Gérard Pelletier croyaient qu’un « French Power » régnait à Ottawa, le concept des deux nations n’est plus qu’un souvenir.

Depuis peu, les Premières Nations émergent, mais elles arrivent à un moment bien inopportun, car le fils de l’autre a proclamé que le Canada est maintenant un État « postnation­al ». Dans un semblable État, les Premières Nations, comme les francophon­es, paraissent destinées à devenir à plus ou moins longue échéance des sociétés folkloriqu­es. On finira par retrouver leurs artefacts au Musée des civilisati­ons et les manuels scolaires relateront leur triste destinée.

Les statistiqu­es démographi­ques donnent froid dans le dos. Il y a un siècle, les francophon­es représenta­ient un tiers de la population canadienne. Aujourd’hui, 20 % seulement de tous les Canadiens déclarent le français comme langue maternelle. En 2043, selon Statistiqu­e Canada, les Québécois, toutes langues confondues, compteront seulement pour 20 % de la population du pays.

UN POURCENTAG­E EN PÉRIL

Confrontés à des chiffres pareils, combien de temps encore députés et ministres francophon­es pourront-ils justifier que l’état fédéral continue de partager un tiers, deux tiers les sommes consacrées à la culture ?

La situation ne s’améliorera pas avec la politique du gouverneme­nt du Québec qui a décidé de limiter à 40 000 le nombre d’immigrants que nous accepteron­s. Pendant ce temps, Ottawa compte en accueillir 340 000 l’an prochain, 10 000 de plus que cette année. Pour seulement conserver notre pourcentag­e en regard de la population canadienne, il faudrait ouvrir les frontières du Québec à deux fois plus d’immigrants. Bonjour la visite !

Au secours, Monsieur Mulroney, il nous faut vite un miracle ! Comme Moïse qui a frappé deux fois le rocher pour en faire surgir de l’eau, cognez sur les têtes de nos chefs politiques et faites ressurgir le vieil accord du lac Meech. C’est une question de vie ou de mort, comme l’eau l’était à l’époque pour les Israélites !

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