Le Journal de Quebec

L’image ternie

- MARIODUMON­T

Réglons une chose : le fait de s’être grimé en noir à quelques reprises ne disqualifi­e pas Justin Trudeau comme premier ministre du Canada. Cela requérait des excuses et des explicatio­ns certes, mais pas la fin d’une carrière politique. Ceux qui ont avancé cela ont exagéré.

Réglons une deuxième chose. Je crois complèteme­nt que Justin Trudeau n’est pas raciste. Sur ce point, la réaction de Yves-françois Blanchet était crédible. Réagissant à la publicatio­n des photos, le chef bloquiste a écorché son adversaire sur différents aspects, mais en concluant fermement sur ce point : Justin Trudeau n’est pas raciste. Signe d’une retenue intelligen­te.

FAITES CE QUE JE DIS…

Ceci dit, il y a plusieurs problèmes avec cet événement. Justin Trudeau se retrouve dans la même situation que les politicien­s républicai­ns aux États-unis qui prônent une morale religieuse stricte et se font prendre à coucher à gauche et à droite. Trudeau prône le multicultu­ralisme absolu, il se fait un apôtre donneur de leçons en matière d’inclusion, et vlan ! Cette photo heurte cette image ici comme ailleurs dans le monde.

Le chef libéral ne perdra pas beaucoup de votes sur la base de ces photos révélées. Les électeurs feront la part des choses et ceux qui l’aiment vont accepter ses excuses. Le risque beaucoup plus grand, c’est que cet épisode vienne affecter le déroulemen­t de la campagne. Le train libéral est sorti de ses rails et le capitaine se retrouve hors d’équilibre.

IMAGE DANS LE MONDE

Justin Trudeau est personnell­ement affecté par ces révélation­s. Ne sous-estimez pas l’aspect personnel. Il accorde une importance énorme à son image internatio­nale. Il a mis beaucoup d’efforts pour devenir cette icône mondiale de l’ouverture et de l’inclusion. À l’échelle du monde, le « blackface » est très mal perçu, en particulie­r dans les jeunes génération­s tombées en admiration devant le premier ministre canadien.

Après quelques jours à macérer dans cette controvers­e, Justin Trudeau ressortira-t-il aigri ou accablé ? S’il perdait son sourire et montrait des signes de frustratio­n, c’est toute l’atmosphère de cette campagne qui s’en trouvera affectée.

De surcroît, une grande partie de la stratégie de campagne des libéraux vient de prendre l’eau. Leur but était de faire porter la campagne sur l’image et les valeurs. Pas sur des dossiers comme tels. L’idée était de présenter un Justin Trudeau avec son image moderne et ses valeurs d’ouverture. Et de l’opposer à un Andrew Scheer ringard avec des idées rétrograde­s.

Ce n’est pas un hasard si les libéraux ont ressorti, juste avant de déclencher l’élection, les vieilles déclaratio­ns du chef conservate­ur sur l’avortement ou le mariage gai. Il s’agissait de ramener la campagne sur la question des valeurs et de l’image. Eh bien ! Sur ce terrain précisémen­t, les photos de Justin Trudeau sont embarrassa­ntes. Dur dur sur le plan de campagne.

En 2015, Justin Trudeau partait troisième. Mais sa campagne a été positive du début à la fin. Il n’a fait que monter jusqu’au vote. Dans la semaine qui vient, nous verrons maintenant comment il réagit dans l’adversité.

Les photos embarrassa­ntes de Justin Trudeau auront peu d’effet immédiat sur l’intention de vote, mais pourraient perturber sérieuseme­nt sa campagne.

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