Le Journal de Quebec

Les déneigeurs ne fournissen­t plus

La pénurie de main-d’oeuvre qualifiée dans le domaine fera exploser les prix des services cet hiver à Val-d’or

- ÉMÉLIE RIVARD-BOUDREAU

VAL-D’OR | Un petit vent de panique souffle sur des résidents de Val-d’or qui n’arrivent pas à trouver une compagnie de déneigemen­t en vue de l’hiver, faute de maind’oeuvre qualifiée.

« Recherche déneigeur – le mien m’a lâché », peut-on lire depuis quelques semaines sur les réseaux sociaux.

De nombreux citoyens de la municipali­té abitibienn­e interrogés par Le Journal disent en effet peiner à réserver leur place dans une compagnie de déneigemen­t.

« J’ai appelé [ma compagnie de déneigemen­t] à la fin du mois d’août en pensant être d’avance, mais ils m’ont répondu qu’ils ne pouvaient pas me prendre. La compagnie réduit sa clientèle, sinon elle ne fournit pas », se désole le Valdorien Sylvain Dufour.

« Celui qui faisait ma cour depuis cinq ans a arrêté d’en faire. J’ai été chanceux, j’ai trouvé quelqu’un d’autre rapidement », témoigne à son tour Sylvain Millaire, résident du quartier Sullivan, un secteur où la demande est particuliè­rement élevée.

RECHERCHE DE MAIN-D’OEUVRE

Depuis septembre, le téléphone du déneigeur Gilles Boutin ne dérougit pas. Même en plein après-midi, il suffit de passer 15 minutes avec lui pour entendre sonner son téléphone au moins trois fois.

« Ce n’est plus juste qu’il manque des déneigeurs, ce sont les compagnies qui lâchent ! » s’exclame le propriétai­re de Déneigepro depuis cinq ans. Lui-même, qui servait entre 250 et 300 clients l’hiver dernier, se limitera à 200 cette année pour offrir un meilleur service à sa clientèle, car il manque de main-d’oeuvre qualifiée.

« Les bons chauffeurs, ils sont rares. Il y en a quatre que je ne reprends pas cette année parce qu’ils ne suivaient pas les normes de l’entreprise », raconte-t-il.

La rareté des bons chauffeurs a aussi découragé Jason Rotunno, propriétai­re de Service Jase, qui travaille dans le domaine depuis une dizaine d’années.

« On prend ce qu’on peut, on donne des chances, mais ça finit par coûter plus cher », explique-t-il.

L’an dernier, il déneigeait 200 résidences. Les employés qu’il avait engagés lui ont fait faux bond en pleine saison et il s’est retrouvé à tout faire seul. Il travaillai­t parfois 24 heures en ligne.

Cette année, il réduit sa clientèle à environ 70 résidences.

« Les clients qui m’appellent, je veux les référer à d’autres, mais la plupart [des autres compagnies] n’en veulent même pas ! Ils ont juste des appels, des appels, des appels, puis ils ne les prennent pas ! » s’étonne-t-il.

Patrick Aubé, propriétai­re de Services Sullivan depuis cinq ans, profite quant à lui de cette manne.

« Cette année, c’est particulie­r, affirmet-il. J’ai déjà une trentaine de nouveaux clients jusqu’à maintenant, puis ça continue de téléphoner ».

HAUSSE DES PRIX

Sa capacité demeure néanmoins limitée. Pour éviter de conjuguer avec les soucis reliés à la pénurie de main-d’oeuvre, il choisit de travailler seul, ce qui lui permet de déneiger seulement entre 75 et 100 entrées. Selon lui, en octobre, sa clientèle sera vraisembla­blement complétée.

La rareté du service entraîne inévitable­ment une hausse des prix. Déneigepro augmentera ses factures de 25 % à 40 %. Pour convaincre des employés de travailler de jour, de nuit, sous pression, et à se faire insulter par des clients frustrés, l’entreprise doit aussi mettre la main dans son portefeuil­le.

« Ils sont tous rendus dans les mines ! Il y a trois ans, les gars gagnaient entre 10 $ et 15 $ de l’heure, aujourd’hui, ils sont rendus à 30 $ ou 35 $ de l’heure. On n’a pas le choix d’ajuster nos prix selon nos chauffeurs », souligne Gilles Boutin.

Les deux derniers hivers, particuliè­rement rudes, ont aussi fait augmenter les prix. Les entreprene­urs doivent sortir plus souvent ou plus longtemps à cause des fortes précipitat­ions.

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PHOTO COLLABORAT­ION SPÉCIALE, ÉMÉLIE RIVARD-BOUDREAU Gilles Boutin, propriétai­re de la compagnie de déneigemen­t Déneigepro, devra réduire son nombre de clients cette année.

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