Le Journal de Quebec

Les États-unis, une business personnell­e

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Le dernier scandale à affliger la Maison-blanche de Donald Trump pourrait être celui qui lui fait plier les genoux. Ou non. Comme on ne se débarrasse pas facilement du PDG corrompu d’une entreprise qui fait de bonnes affaires, le président américain gère le pays comme sa business à lui. Et il n’en fait qu’à sa tête.

La dernière tempête à balayer la présidence des États-unis vient d’ukraine. Au cours de l’été, Donald Trump lui-même aurait demandé à répétition à Volodymyr Zelensky, le président ukrainien nouvelleme­nt élu, de mettre en branle une enquête sur les activités commercial­es du fils de Joe Biden, Hunter, dans son pays.

Le travail d’investigat­ion remarquabl­e, encore une fois, du Washington Post, du New York Times et du Wall Street Journal n’a pas encore réussi à confirmer que le président Trump aurait retenu le versement de 250 millions de dollars d’aide militaire américaine à Kiev dans l’attente du déclenchem­ent d’une telle enquête.

Dans n’importe quelle autre dimension spatio-temporelle, solliciter l’aide d’un gouverneme­nt étranger pour récolter de l’informatio­n compromett­ante sur un adversaire politique provoquera­it une crise politique nationale avec audiences au Congrès et marche accélérée vers la destitutio­n de ce fourbe de président.

Dans cette dimension spatio-temporelle ci, il faut voir ce qui semble s’être passé avec l’ukraine — la pression, le chantage, l’extorsion, le complot — comme business as usual. Donald Trump dirige la présidence américaine comme il a mené les affaires de la « Trump Organizati­on » : avec un minimum de consultati­ons et un maximum d’implicatio­n personnell­e. C’est lui qui décide, peu importe les conséquenc­es.

DE L’IMPROVISAT­ION, ENCORE ET TOUJOURS DE L’IMPROVISAT­ION

Chaque fois que l’on s’intéresse à ce qui se passe à la Maison-blanche ces temps-ci, il faut revenir au 8 novembre 2016. Donald Trump peut prétendre l’inverse, mais personne, pas plus lui, ne s’attendait à ce qu’il gagne l’élection présidenti­elle. Inutile de refaire le procès du collège électoral qui lui a ouvert la voie au sommet de l’état, bien qu’il ait récolté 2,9 millions moins de voix qu’hillary Clinton.

Chaque nouvelle journée prouve qu’il n’était pas préparé à assumer les tâches présidenti­elles. On le voit encore — 976 jours après son assermenta­tion — par le va-et-vient constant au sein de son administra­tion, par l’enchaîneme­nt de décisions qui vont à l’encontre des traditions politiques et législativ­es du pays et par ses laïus interminab­les parsemés de simplifica­tions, d’exagératio­ns et de faussetés.

MA BUSINESS À MOI !

Plus le temps passe et plus Donald Trump reproduit dans le Bureau ovale ses façons de faire de la Trump Tower à New York. Il regarde une quantité astronomiq­ue de télé, passe des heures au téléphone et prend seul ses décisions. Il s’entoure de gens aux pouvoirs affaiblis ou de yes men.

Les affaires du pays comme celles de sa compagnie doivent finir par lui rapporter, conséquenc­e de sa victoire. Les pilotes de l’armée de l’air qui se posent en Écosse pour leur ravitaille­ment ? Normal qu’ils aillent dormir à sa propriété de Turnberry. Le vice-président Mike Pence en visite officielle en Irlande ? Aussi bien séjourner au Trump Internatio­nal Golf de Doonbeg. Et ainsi de suite.

Dernier travers de son ancienne vie, il ne fait ultimement confiance qu’aux membres de sa famille. Brad Parscale, le directeur de sa campagne de réélection, évoque, comme pour n’importe quelle business, sa succession et parle sans gêne d’une dynastie Trump à la tête des États-unis. Le fils, Donald Jr ? Jared, le gendre ? Ou Ivanka, sa favorite ? À ça au moins, il y a pensé, le PDG.

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