ARGENT Une relance qui arrive trop tard ?
Les bonnes occasions d’affaires se sont envolées
Juillet 2015. Éric Martel annonce à la surprise générale le grand retour d’hydro-québec sur la scène internationale. Quatre ans plus tard, le plan du président et chef de la direction fait toutefois du surplace.
Cette expansion internationale devait être au coeur de la stratégie 2016-2030 de la société d’état, qui souhaite doubler d’ici 11 ans ses revenus pour atteindre 27 milliards de dollars.
Les acquisitions d’infrastructures devaient, selon ce plan, former les trois quarts de la croissance internationale, les 25 % restants étant principalement les exportations d’hydroélectricité vers l’ontario et les États du nord-est des États-unis.
Mais quatre ans plus tard, Hydro-québec n’a ni acheté ni construit en dehors des frontières de la province.
Ce n’est pas faute d’avoir essayé, assure Serge Abergel, porte-parole d’hydro-québec.
La trentaine d’employés d’hydro-québec International (HIQ) évalue en continu différents investissements potentiels, dit-il.
« On a regardé des dizaines de projets, en Colombie, au Chili, au Pérou, en Amérique du Nord », énumère-t-il.
À plus d’une reprise, HQ a été coiffée à la ligne d’arrivée par d’autres investisseurs. Dans d’autres cas, des craintes en matière de collusion et de corruption auraient poussé Hydro-québec International à mettre la pédale douce sur certaines possibilités d’investissements.
LE CONTEXTE A CHANGÉ
En 15 ans, le marché international de l’électricité s’est complètement transformé, ajoute l’avocat Erik Richer La Flèche, lequel conseille des entreprises et des gouvernements dans le cadre d’opérations de fusions et d’acquisitions en infrastructure et en électricité.
L’ambition de M. Martel de doubler les revenus au moyen de l’acquisition d’infrastructures à l’étranger est-elle réaliste ?
« C’est une très grosse commande », estime l’expert.
HQI a perdu son expertise. Les autres joueurs ont aussi changé… et se sont multipliés. Des fonds d’investissement comme la Caisse de dépôt et placement ou Brookfield n’hésitent plus à investir dans des actifs, voire à en devenir les opérateurs.
Il croit toutefois qu’un rôle subsiste pour HQI « au sein de consortiums ».
La réalité, c’est que la plupart des bonnes occasions d’affaires se sont envolées, ajoute le titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie de HEC Montréal, Pierre-olivier Pineau.
Comme le démontre la valeur actuelle des anciens actifs d’hydro-québec, le prix de ce genre d’infrastructure a explosé en 15 ans.
PERTE DE CONTACTS ET D’EXPERTISE
« En vendant, HQI a perdu non seulement des actifs, mais son réseau de contacts et une expertise. On est sorti d’un secteur à un moment où l’on aurait probablement dû y rester. Aujourd’hui, repartir de rien, c’est difficile. »
Quoi qu’il en soit, l’entreprise hydroélectrique garde l’oeil ouvert, assure Serge Abergel. Il estime que les objectifs financiers 2016-2030 demeurent réalisables, notamment grâce à l’exportation d’électricité vers le nord-est américain.
Le gouvernement Legault, qui mise beaucoup sur l’exportation de l’électricité québécoise, affirme « suivre de près » les initiatives de la société d’état.
« Bien que notre priorité demeure la croissance des exportations d’électricité, notre volonté est que la grande expertise d’hydro-québec pour réaliser différents projets à l’international soit mise à contribution, afin d’améliorer la rentabilité de l’entreprise et d’enrichir les Québécois », a indiqué Claude Potvin, porte-parole du ministre de l’énergie, Jonatan Julien.