« Mon père savait tout dire »
Le fils du cinéaste Pierre Falardeau avait levé bien haut le poing de la liberté lors des funérailles de son père, il y a dix ans. Aujourd’hui, Jules Falardeau, qui marche dans ses pas comme réalisateur, s’anime encore pour défendre les mêmes convictions.
« La marche d’un peuple vers sa libération, mon père savait que c’était long, raconte Jules Falardeau en entrevue. C’est poche. Il y a des débandades et des victoires, mais on est en marche. J’avance dans cette optique-là dans ma propre vie. »
La liberté, c’est une route tortueuse sur laquelle son père n’est pas seul à avoir marché, précise son fils, âgé de 34 ans. Jacques Parizeau, le boxeur Reggie Chartrand, Lise Payette et le syndicaliste Michel Chartrand sont ceux qu’il nomme comme alliés qui partagent le rêve de faire un pays.
Le 25 septembre 2009, le cinéaste, écrivain et fier indépendantiste Pierre Falardeau nous quittait à l’âge de 62 ans. Après avoir tenu son bout avec une parole directe et franche dans de nombreuses batailles, il perdait celle menée contre le cancer.
LE COMBAT D’UNE VIE
Son combat pour un Québec libre s’étend au-delà du simple désir de souveraineté, explique Jules Falardeau, qui a entre autres réalisé les documentaires Reggie Chartrand, patriote québécois et Just Watch Me, ainsi que Le labo du Docteur Bull, disponible sur la plateforme Tabloïd. C’est surtout le sens qui se cache derrière la démarche de Pierre Falardeau qui interpelle profondément son fils aujourd’hui.
« Ça me fascine encore plus depuis qu’il n’est plus là : comment il savait se tenir debout. Il avait dit “Si tu te couches, ils vont te piler dessus. Si tu restes debout et tu résistes, ils vont te haïr, mais ils vont t’appeler monsieur”. Le fait de rester debout et digne, c’est très important pour moi », dit-il. Prendre la parole en public, ça ne lui ressemblait pas, « mais il fallait que quelqu’un le fasse, donc il le faisait », assure-t-il.
DES MESSAGES À RÉPÉTER
Si Pierre Falardeau jugeait que sa génération s’était écrasée, Jules est conscient que la sienne est semblable aux autres.
« J’étais vraiment ému par le printemps étudiant en 2012 et je pense que mon père aurait été touché par ça. On a vécu les bassesses du gouvernement, on a compris comment le pouvoir et les médias maquillent ce qui se passe, mais à cette époquelà, on s’est réveillés. Tous les soirs, 10 000 personnes étaient dans la rue à s’initier à la lutte politique. Puis on est partis en vacances, on a laissé les choses s’essouffler et maintenant on rêve d’être influenceurs », souffle-t-il dans l’incompréhension.
« C’est le rôle des intellectuels et des artistes de rendre ça attrayant comme ça devrait l’être. C’est pas juste une question institutionnelle qui appartient à des gens en cravate. Faut que ça soit transmis souvent un message comme celui-là. »
Il n’est pas inquiet, toutefois, de ne pas remarquer en 2019 la présence d’un polémiste indépendantiste de la même envergure que son père. « Quand je vois Émile Bilodeau, Robin Aubert ou Julien Lacroix qui s’expriment en faveur de la souveraineté à leur manière, je me dis que le grand personnage s’est peut-être fragmenté ici et là. Il n’est pas disparu. »