Le Journal de Quebec

Le faux scandale du soi-disant blackface de Trudeau

- JOSÉE LEGAULT Blogueuse au Journal Politologu­e, auteure, chroniqueu­se politique josee.legault @quebecorme­dia.com @joseelegau­lt

Une question s’impose. Que se cache-t-il derrière le pétard mouillé du faux scandale entourant le soi-disant blackface de Justin Trudeau ? Un sondage pancanadie­n Léger/le Devoir, publié hier, confirme en effet qu’il n’a eu aucun impact sur les intentions de vote.

Seul mouvement notable, le Bloc québécois devance de peu le PLC chez les francophon­es. Ce qui, par contre, ne découle pas de ce faux scandale. La bonne performanc­e de son chef Yves-françois Blanchet l’explique bien mieux. Comme je l’écrivais mardi, son choix d’arrimer le Bloc au nationalis­me de la CAQ fut aussi le bon.

Alors, que dire de ce fameux blackface et de tous les hauts cris poussés au « racisme » dans les médias hors Québec ? Pourquoi n’ont-ils pas ému les électeurs ? Primo, personne ne pense vraiment que Justin Trudeau est raciste. Comme tout ce qui est exagéré devient insignifia­nt, cette vilaine accusation est tombée à plat.

MÊME NARRATIF

Deuxio, l’instrument­alisation partisane de cette histoire par le chef conservate­ur Andrew Scheer avait toute la subtilité d’un hippopotam­e dansant le ballet au milieu d’une autoroute. Tertio, les images du jeune Trudeau maquillé en noir ou brun n’avaient rien à voir avec le maquillage d’un vrai blackface – une pratique raciste américaine visant à déshumanis­er les personnes noires.

Ce qui nous amène aux médias canadiens-anglais. Ils ont été nombreux à se servir, à satiété, de l’affaire SNC-LA-valin pour remettre en question l’intégrité du premier ministre, le traiter de « faux féministe » et douter de sa défense des nations autochtone­s. Rebelote avec l’affaire du blackface. Cette fois-ci, on l’a présenté comme un raciste. Rien de moins.

Or, ce narratif est celui-là même que fignolent les conservate­urs depuis des mois. Leurs pubs électorale­s martèlent le même message : Justin Trudeau, « pas celui qu’il prétendait être ». Le chef libéral serait donc un imposteur. Idem pour la couverture de la vidéo d’un très jeune Justin maquillé en noir – envoyée par les conservate­urs au réseau Global News.

SAGESSE

Global News est allé jusqu’à titrer son reportage : « Video shows Trudeau in blackface, in third instance of racist makeup ». (Une vidéo montre Trudeau en blackface, dans un troisième cas de maquillage RACISTE.) Une tentative évidente de conditionn­er l’opinion.

Ce qui soulève un autre phénomène : la montée du conservati­sme dans les grands médias anglo-canadiens, même parmi ses commentate­urs vedettes. Ce n’est pas une théorie de complot, mais un simple constat. Dans cette mouvance allant du centre-droit à la droite, Justin Trudeau, le « progressis­te », est devenu un adversaire d’office.

Non pas que le chef libéral manquerait de faiblesses à analyser. Son jugement superficie­l sur certaines questions de fond en est une parmi d’autres. Nettement plus troublante est la propension de certains médias néoconserv­ateurs anglophone­s à verser dans le militantis­me antilibéra­l.

Une bonne nouvelle pour le processus démocratiq­ue est que l’électorat, sûrement impatient de voir les vrais enjeux de la campagne prendre enfin le dessus sur les faux scandales, n’a pas mordu à l’hameçon.

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Comme tout ce qui est exagéré devient insignifia­nt, cette vilaine accusation de racisme est tombée à plat.

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