Le Journal de Quebec

Quand la performanc­e devient toxique

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Partageant des grands pans de son expérience personnell­e, Marie-josée Michaud, ancienne gestionnai­re aujourd’hui stratège, intervenan­te en entreprise et conférenci­ère en matière de santé psychologi­que au travail, explique comment éviter que la performanc­e devienne toxique dans son nouveau livre, 80 heures par semaine.

Pour s’être retrouvée elle-même dans une belle jaquette verte d’hôpital, en 2005, Marie-josée Michaud sait de quoi est faite une dépression liée à l’hyperperfo­rmance. Elle explique le processus mental et physique qui peut mener vers une dépression et comment éviter de s’enfoncer dans cette spirale négative.

Pas le choix : elle a dû changer son mode de vie, établir de nouvelles priorités et redéfinir les critères qui allaient lui permettre de vivre de manière plus saine. L’exercice a été salutaire, et elle partage maintenant ses connaissan­ces en entreprise, notamment auprès des gestionnai­res.

LES PEURS…

La stigmatisa­tion en milieu de travail, en matière de santé psychologi­que, est encore bien présente, a-t-elle pu observer après avoir conduit un sondage auprès du gouverneme­nt fédéral.

« Parmi les raisons pour lesquelles les gens ne vont pas chercher de l’aide, il y a la peur de ne pas paraître performant ou compétent, d’être pénalisé dans sa propre carrière, et aussi la peur de ne pas pouvoir entrer en action, pour accommoder et aider une personne. Il y a la peur de créer de faux espoirs et de ne pas pouvoir accompagne­r une personne adéquateme­nt. Ça me fait mal au coeur de voir qu’encore aujourd’hui, il y a ces choses-là qui arrivent », dit-elle en entrevue.

Une bonne nouvelle vient compenser cela : il y a des entités gouverneme­ntales et des entreprise­s qui veulent faire face au problème, ajoute-t-elle. « Elles n’ont pas le choix. Il faut que les choses avancent dans la bonne direction. On n’est plus dans une économie où on travaille avec nos bras et nos jambes, c’est de plus en plus avec notre tête. Et notre tête devient malade, à un moment donné, si on ne fait pas attention. »

TOXIQUE

Mais comment la performanc­e peut-elle devenir toxique ? « Quand tu es pris dans l’engrenage de l’hyperperfo­rmance, tu ne sais plus où est la limite. Est-ce que je fais cela pour les bonnes raisons ? Est-ce que je suis en train de travailler sur la bonne affaire ? Plus tu es en hyperperfo­rmance, plus tu es en hypervigil­ance, où tu commences à te sentir en danger tout le temps, dans plein d’aspects de ta vie. »

Marie-josée se souvient d’avoir voulu être parfaite, dans tout, de manière à ce que personne ne trouve quoi que ce soit à lui reprocher dans son travail ou comme parent. Le stress augmente, le taux d’adrénaline augmente, et l’équilibre hormonal est perturbé. « Tu t’intoxiques et à un moment donné, ton cerveau flanche parce qu’il n’est plus capable d’éliminer les toxines. »

ALLER EN PROFONDEUR

Elle invite les gens à cesser de vouloir appliquer des recettes. «Allons plus en profondeur, pour voir pourquoi et comment une personne se sent toujours obligée d’être parfaite ou de réussir, ou d’être la meilleure, ou peut-être de démolir un collègue parce qu’il est en train de la faire mal paraître. »

Dans son livre, elle fournit plusieurs pistes pour aider les gens à revenir « sur la bonne voie » et ne pas se laisser dériver d’une façon inconscien­te et malade. Il n’est pas question de devenir incompéten­t, paresseux ou de remiser son ambition. « Je veux donner la chance aux gens de ne pas faire les mêmes erreurs que moi, pour qu’ils puissent continuer à performer, au bon moment, pour les bonnes raisons, et de la bonne façon, en sachant préserver leur énergie vitale. »

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