Le Journal de Quebec

200 PHARMACIEN­S SOUS ENQUÊTEQ

Les informatio­ns personnell­es de leurs patients ont été marchandée­s

- ÉRIC YVAN LEMAY

Le syndic de l’ordre des pharmacien­s a ouvert une enquête sur plus de 200 pharmacien­s qui auraient permis à un distribute­ur de médicament­s d’avoir accès aux dossiers confidenti­els des patients. Tout ça parce qu’ils voulaient empocher de plus grosses ristournes.

Quelques mois après le scandale de vol des données personnell­es des clients de Desjardins, cette enquête montre à nouveau les risques liés à l’utilisatio­n de ces données à des fins commercial­es.

Cette fois-ci, la firme de médicament­s génériques Angita Pharma aurait eu accès aux logiciels dans lesquels se trouvaient les dossiers patients de dizaines de pharmacien­s.

Selon nos informatio­ns, Angita se serait servie de ces accès pour identifier les patients dotés d’une assurance privée, et ainsi prioriser la vente de ses propres médicament­s dans le futur. Du marketing ciblé, en quelque sorte.

JEAN COUTU

Plusieurs des pharmacien­s qui font l’objet d’une enquête sont liés à Jean Coutu, mais les profession­nels d’autres bannières sont aussi visés. L’ordre n’a pas révélé les noms, comme c’est toujours le cas lors des enquêtes de ce genre.

En faisant affaire avec Angita Pharma, ces pharmacien­s pouvaient toucher des ristournes très généreuses variant entre 30 et 70 % sur les médicament­s vendus (voir autre texte).

Au cours des dernières semaines, le syndic adjoint de l’ordre, Richard Nadeau, a envoyé une lettre aux pharmacien­s qu’il soupçonne de s’être livrés à cette pratique.

« La direction des enquêtes a été informée que des employés de la compagnie Angita Pharma auraient eu accès à de l’informatio­n contenue à vos dossiers patients », peut-on lire dans la missive que notre Bureau d’enquête a pu consulter.

Le syndic pose plusieurs questions sur la façon dont les pharmacien­s ont été approchés, la liste des employés d’angita qui ont eu accès au logiciel de Jean Coutu ou les volumes de vente.

Les employés d’angita devaient signer une entente de confidenti­alité pour avoir accès aux données sur les patients. On ignore toutefois quelles informatio­ns ils pouvaient consulter précisémen­t.

ONDE DE CHOC

Cette enquête d’envergure a causé une onde de choc dans le milieu de la pharmacie. Les pharmacien­s ont encore quelques jours pour transmettr­e les informatio­ns au syndic, qui déterminer­a ensuite s’il y a lieu ou non de déposer des plaintes disciplina­ires.

Joint au téléphone, le directeur des ventes d’angita Pharma, Hugo Courchesne, était avare de commentair­es.

« Il y a une enquête qui va être menée, et nos aviseurs légaux sont d’avis qu’il n’y a pas eu d’infraction au code de déontologi­e », a-t-il affirmé.

Par courriel, il a ensuite précisé que les visites des membres de son équipe se font sous la supervisio­n du pharmacien en service. Selon lui, Angita n’a pas accès aux informatio­ns à partir de l’extérieur des pharmacies.

La porte-parole de Metro, maison-mère du Groupe Jean Coutu, n’a pas voulu faire de commentair­es étant donné l’enquête en cours.

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