Le Journal de Quebec

L’UPAC cafouille et Zampino est libéré

- ERIC THIBAULT

Une bavure de L’UPAC a permis à l’ex-numéro 2 de la Ville de Montréal d’être libéré de toute accusation, hier, donnant d’autres munitions au gouverneme­nt pour réformer la police.

L’arrêt des procédures décrété contre Frank Zampino parce qu’il a été la cible d’écoute électroniq­ue illégale n’a rien pour refroidir les intentions de la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, qui veut moderniser la police, dont les ratés ont fait la manchette depuis quelques années au Québec.

En entrevue avec notre Bureau d’enquête il y a une semaine, la ministre déplorait que certaines enquêtes « ne connaissen­t pas le dénouement auquel on se serait attendus » et espérait que la formation soit améliorée à l’unité permanente anticorrup­tion (UPAC).

Le projet Fronde de L’UPAC, qui a nécessité six ans d’enquête sur un présumé stratagème de contrats truqués à la Ville de Montréal en retour de financemen­t politique, risque de s’écrouler à la suite du coup de massue judiciaire d’hier.

DISCUSSION­S CLIENT-AVOCAT

La juge Joëlle Roy a conclu que L’UPAC avait commis des violations « nombreuses et graves » aux droits constituti­onnels de Frank Zampino en épiant de façon « calculée » 39 communicat­ions qu’il a eues avec son avocate, Me Isabel Schurman, entre juin et août 2015.

À l’époque, l’ex-président du comité exécutif de Montréal était « en pleine préparatio­n de son procès » dans le dossier Faubourg Contrecoeu­r, qui s’était soldé par un cuisant échec pour L’UPAC avec des acquitteme­nts sur toute la ligne en 2018.

Les discussion­s entre l’avocate et son client auraient dû rester confidenti­elles en vertu du secret profession­nel, a tranché la juge.

Le Tribunal a aussi déploré que les demandes d’écoute électroniq­ue « viciée » de L’UPAC aient été autorisées par un autre juge, en toute connaissan­ce de cause.

Ce juge avait prévu des « modalités pour préserver le privilège client-avocat » en filtrant lui-même, parmi les conversati­ons intercepté­es, lesquelles pourraient être admises en preuve.

« Le privilège avocat-client ne se fragmente pas au cas par cas », a décrié la juge Roy en invalidant les mandats émis par son collègue.

CINQ COACCUSÉS

Toute l’enquête risque maintenant de tomber à l’eau puisque les cinq coaccusés de M. Zampino, dont le procès pour fraude devait débuter hier, pourraient eux aussi présenter des requêtes en arrêt de procédures sous les mêmes motifs.

Pas moins de 624 conversati­ons sur les 57 000 intercepté­es lors du projet Fronde impliquent des coaccusés de M. Zampino et leurs avocats. Leur cause a été ajournée à lundi prochain.

« C’est un jugement critique à l’égard de la façon de procéder dans cette enquête et il faudra prendre le temps de l’analyser », a réagi Me Julien Tardif, l’un des procureurs de la poursuite, en ajoutant que « toutes les possibilit­és » sont sur la table pour la suite du dossier.

« Nous sommes très heureux de cette décision qui est juste pour M. Zampino, mais aussi pour tous les Canadiens », s’est réjouie Me Schurman, tandis que Frank Zampino préférait garder le silence devant les journalist­es.

 ?? PHOTO MARTIN ALARIE ?? L’ancien numéro 2 de la Ville, Frank Zampino, accompagné de son avocate Isabel Schurman, a été libéré des accusation­s de complot, de fraude et d’abus de confiance qui pesaient sur lui depuis 2017, hier, au palais de justice de Montréal.
PHOTO MARTIN ALARIE L’ancien numéro 2 de la Ville, Frank Zampino, accompagné de son avocate Isabel Schurman, a été libéré des accusation­s de complot, de fraude et d’abus de confiance qui pesaient sur lui depuis 2017, hier, au palais de justice de Montréal.

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