Le Journal de Quebec

Un hommage qui tarde à venir

Le fils de Gilles Latulippe souhaite qu’on salue la mémoire de son père

- PIERRE O. NADEAU

Déjà cinq ans que Gilles Latulippe a quitté ce monde, et son hommage posthume se fait toujours attendre. Ni parc en son nom à Montréal, ni statue, ni même une biographie exprimée sous forme d’un livre, d’une télésérie ou d’un film.

Son fils Olivier s’en désole, mais il retient surtout la vague d’amour ressentie au décès de notre Symphorien national et roi du burlesque, emporté par un cancer du poumon le 23 septembre 2014, à l’âge de 77 ans.

« Plus de 2000 personnes étaient venues lui témoigner leur affection et leur admiration dans la chapelle ardente aménagée à l’hôtel de ville de Montréal. Je savais que les gens l’aimaient beaucoup, mais pas à ce point. C’est incroyable le nombre de personnes qui m’ont dit à quel point mon père leur a fait du bien. »

MONTRÉAL N’A PAS EMBOÎTÉ LE PAS

Après avoir fait rire le Québec durant plus d’un demi-siècle, le créateur du Théâtre des Variétés s’est éteint en laissant en héritage son ton blagueur et espiègle, et son irrésistib­le talent de joueur de tours.

La Ville de Longueuil, où il a longtemps vécu, a créé à sa mémoire le parc Gilles-latulippe, près du métro, qui sera inauguré sous peu après des travaux de réaménagem­ent. Mais Montréal n’a pas encore emboîté le pas, souligne Olivier Latulippe, en rappelant que son père adorait se promener dans les parcs.

« Mais ce n’est pas à moi à aller frapper aux portes », ajoute-t-il.

Olivier Latulippe aurait également aimé voir la vie et la carrière de son père racontées dans un film ou une télésérie.

« Mais je comprends aussi que les gens heureux n’ont pas d’histoire. Mon père a vécu plus de 50 ans avec la même femme, il ne buvait pas, il ne se droguait pas. Je ne pense pas que ça aurait fait un bon show », affirme en souriant son fils unique, dont le prénom fait bien sûr référence à un autre champion du vaudeville, Olivier Guimond.

Quant à une statue à l’effigie du coanimateu­r des Démons du midi, Olivier juge qu’elle ne collerait pas à l’usage de simplicité de l’homme, pourtant considéré comme un monument de l’humour.

MIEUX VAUT EN RIRE

Son père a légué une dizaine de livres de blagues. Olivier Latulippe se dit persuadé que ses gags reviendron­t éventuelle­ment au goût du jour. La seule autobiogra­phie le concernant a été publiée en 1997, sous le titre Avec un sourire.

« Mon père a été un grand homme avec une belle philosophi­e de vie, qui prêchait le “mieux vaut en rire”. Encore aujourd’hui, ça m’aide à surmonter les difficulté­s de la vie », explique le jeune avocat de formation qui s’est découvert une nouvelle passion comme agent immobilier.

« Mon père riait de tout. Et quand il s’est retrouvé très malade, il tenait à ce qu’on n’en parle à personne. Il ne voulait surtout pas attirer la pitié », raconte-t-il.

« Il a été hospitalis­é deux jours après sa dernière représenta­tion à son théâtre de Drummondvi­lle. Sur scène, il se sentait revigoré, mais après ses derniers shows, il s’écrasait dans un fauteuil mis à sa dispositio­n. »

Deux mois avant de mourir, Gilles Latulippe a reçu un vibrant hommage télévisé de Juste pour rire.

« Il n’a pas voulu laisser paraître qu’il ne lui en restait plus longtemps à vivre. Il se retenait pour ne pas tousser. Il m’avait dit : “J’ai fait rire les gens pendant plus de 50 ans, je ne vais quand même pas les faire pleurer avant de mourir”. »

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PHOTOS MARTIN ALARIE ET D’ARCHIVES Gilles Latulippe Olivier Latulippe aimerait bien que son père, Gilles (décédé en 2014), reçoive l’hommage posthume qu’il mérite amplement.

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