Le Journal de Quebec

Le lieutenant bleu contre le Bloc

- ANTOINE ROBITAILLE antoine.robitaille@quebecorme­dia.com

Lundi, je devais aller faire une entrevue-jogging avec Alain Rayes à Victoriavi­lle, mais il pleuvait tellement qu’on a abouti au Tim Hortons.

Au Tim, avec un politicien, tôt le matin, il y a souvent de beaux malaises.

Comme ces trois tables où on m’a répété ceci : le chef conservate­ur Andrew Scheer ne « passe » vraiment pas dans la circonscri­ption, voire au Québec.

« Je vais voter contre mes principes pour appuyer Alain », lance un des clients à une table.

L’électeur ajoute : « Alain, il ne restera pas là, il va aller à la tête », dit-il parlant de la chefferie du Parti conservate­ur.

Rayes, lieutenant de Scheer au Québec, entend les propos, fronce les sourcils, me lance, mi-blagueur : « Je veux pas que tu écrives ça ! Je n’ai aucun intérêt pour ça ! Ma femme m’arracherai­t la tête en plus. »

En moins d’une heure, à d’autres tables, deux autres clients défendront la même idée. « Arrêtez ! C’est pas mon ambition du tout », martèlera Rayes, alors irrité.

TRAITEMENT DE FAVEUR

C’était avant le second débat ; avant le sondage Léger d’hier aussi, lequel indiquait une forte remontée du Bloc.

La veille, dimanche, Rayes sentait déjà le besoin de faire une sortie pour contrer le parti d’yves-françois Blanchet, qui a selon lui un traitement de faveur de la part des médias.

Je lui soumets qu’en début de campagne, le Bloc ne semblait pas tellement compter dans le discours conservate­ur.

Faux ! rétorque-t-il vigoureuse­ment. « Depuis le jour 1, à part dans certaines régions, on le dit : le Bloc est notre adversaire principal. »

Il se dit heureux qu’enfin les médias commencent à poser de sérieuses questions au Bloc : à propos de certains candidats qui partagent des publicatio­ns de La Meute sur Facebook ; d’autres qui s’affichent comme pro-vie.

STRATÉGIE LOCALE

Rayes estime que les sondages occultent l’importance du choix des candidats conservate­urs, souvent des vedettes locales très connues dans leur milieu.

C’est l’essence même du plan Rayes pour conquérir le Québec, qui « va déjouer une partie des sondages dans bien des endroits », prédit-il.

Candidat adéquiste en 2003, il estime que de voter conservate­ur en 2019, c’est opter pour un « beau risque 2.0 » (inspiré de la formule de Lévesque en appui à Mulroney en 1984), où seraient réalisées les revendicat­ions du Québec de l’ère Legault : déclaratio­n de revenus unique, pouvoirs en immigratio­n, pas de contestati­on de la loi 21 sur la laïcité.

À ceux qui ont voté pour la CAQ parce qu’ils voulaient cette loi-là, il dit : « La seule façon de la protéger, qu’il n’y ait aucune contestati­on, c’est […] la plus grande délégation possible de députés conservate­urs dans un gouverneme­nt conservate­ur. »

Je lui dis que tant qu’à y être, pourquoi ne pas aller plus loin : s’engager à joindre le Procureur général du Québec, qui défendra sa loi face aux contestati­ons de citoyens ?

« On ne s’ingérerait pas d’une façon ou d’une autre », répond-il après un moment de réflexion… et un autre petit malaise.

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Alain Rayes salue des électeurs de Richmond-arthabaska au Tim Hortons de Victoriavi­lle.

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