Le Journal de Quebec

Au diable ! le débat de ce soir

- GUY FOURNIER guy.fournier @quebecorme­dia.com

Pour préserver ma santé mentale et ne pas m’écoeurer à jamais de la politique, je m’abstiendra­i de regarder le débat de ce soir à Radio-canada. Je vous invite à en faire autant.

Le débat en langue anglaise a fait la preuve qu’un débat télévisé est une affaire trop sérieuse pour qu’on en laisse les règles entre les mains d’un ancien gouverneur général. De toute évidence, ce pauvre David Johnston ne connaît rien à la télévision, et encore moins à la communicat­ion.

Le débat de lundi en anglais – celui de ce soir doit suivre le même modèle – répond parfaiteme­nt à la descriptio­n « du chameau qui est un cheval dessiné par un comité ». Hélas ! ce chameau informe a coûté un bras.

Pour en arriver à une empoignade aussi stérile, la Commission des débats a instruit une vaste consultati­on « coast to coast », organisé une série de tables rondes à Halifax, Montréal, Toronto, Winnipeg et Vancouver, et tenu huit réunions du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre des Communes. Rien de moins. Quand Ottawa se met en train, money is no object.

DES NOMS À RETENIR

J’aimerais immortalis­er pour la postérité les noms des membres de la géniale commission que préside l’ex-représenta­nt de la reine au Canada. Il s’agit de Chad Gaffield, président de la Société royale du Canada, de Deborah Grey, ancienne députée du Parti réformiste, de Craig Kielburger, entreprene­ur social (?), de Jean La Rose, pdg du réseau autochtone APTN, de Megan Leslie, pdg du Fonds mondial pour la nature, de John Manley, pdg du Conseil canadien des affaires, et de Louise Otis, présidente du Tribunal de l’organisati­on de coopératio­n et de développem­ent économique.

Cet aréopage émérite, de toute évidence fort peu versé dans l’art de la communicat­ion, a par la suite choisi Cbc/radio-canada, La Presse, Le Devoir, L’actualité, CTV, Global, le Toronto Star et le Huffington Post comme producteur­s des deux débats. S’ils ont pris les décisions finales, ce débat foireux démontre que journal et télévision sont deux médias si différents que le mariage de l’un et de l’autre ne fait pas des enfants forts.

UNE INSULTE À L’INTELLIGEN­CE

Si la CBC et les deux réseaux anglais sont les premiers responsabl­es du format, ne nous étonnons pas que la télévision anglophone ait si peu d’audience. Cette triste foire d’empoigne, faite de « clips » et d’insultes, est à l’image de la télévision actuelle, toujours à la recherche de sensation et de coups de gueule, allergique à la substance et à l’analyse.

L’heure choisie pour le débat « national » montre aussi à quel point la télé anglophone – y compris la CBC – n’est pas prête à perdre un seul sou de publicité pour le bien public. Quel mépris pour les citoyens de la Colombie-britanniqu­e et de l’alberta que de commencer un débat à l’heure où ils sont encore au travail ou entament le retour à la maison, tout ça pour ne pas perdre de publicité en temps de haute écoute !

Au mieux, ces deux heures de débat creux et insipide m’ont fait penser au dialogue de sourds dont Twitter est le champion incontesté. Pour une fraction du coût, le Face-à-face de TVA a fait oeuvre utile, alors que le débat de lundi fut une véritable insulte à l’intelligen­ce.

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