Une tonne d’expertise perdue
Pas moins d’une vingtaine de dirigeants ont quitté depuis l’achat par Lowe’s
Depuis qu’il a avalé RONA en 2016, le quincaillier américain Lowe’s a poussé vers la sortie au moins 20 dirigeants: treize vice-présidents et sept directeurs principaux ne sont plus à l’emploi du fleuron québécois auquel ils avaient oeuvré pendant plusieurs années.
Liés par des ententes de confidentialité, rares sont les « ex » de RONA à accepter de parler des circonstances de leur départ du siège social de Boucherville.
« Depuis le début, avec Lowe’s, c’est une véritable chasse aux sorcières contre ceux qui étaient associés à RONA », a décrit l’un d’entre eux, sous le couvert de l’anonymat.
Selon une compilation réalisée par TVA Nouvelles, la plupart de ces 20 dirigeants ont été congédiés. D’autres ont décidé de quitter leurs fonctions dans un contexte de fortes tensions. Leurs remplaçants ont tous été nommés par la nouvelle direction de Lowe’s.
« Ils se sont carrément débarrassés de l’expertise de RONA. C’est devenu une obsession », s’est indigné un ancien dirigeant ayant oeuvré une dizaine d’années pour RONA, avant l’acquisition.
Pour mettre la main sur RONA, Lowe’s avait pourtant pris une dizaine d’engagements auprès du gouvernement fédéral. Parmi ceux-ci, la promesse de « maintenir en poste les principaux dirigeants de la solide équipe de direction de RONA ».
Cet engagement semble aujourd’hui mis à mal par les départs d’une vingtaine de gestionnaires qui ont fait carrière chez RONA.
« On a l’impression que l’intégration des deux entreprises ne s’est jamais réalisée, a analysé le professeur Robert Pouliot, spécialiste des fusions-acquisitions. Si on se débarrasse de ceux qui connaissaient bien le marché, forcément, on risque d’avoir des problèmes. »
UN FACTEUR AGGRAVANT ?
En février dernier, Lowe’s a révisé en forte baisse la valeur de sa division canadienne à 2 milliards $, en chute de 1,2 milliard $.
Plusieurs anciens dirigeants de RONA estiment, sans accepter d’en parler publiquement, que ces difficultés ont été amplifiées par les changements rapides et nombreux au sein de la direction.
Le quincaillier a refusé les demandes d’entrevue de TVA Nouvelles à ce sujet. Une porte-parole a tenu à indiquer que Lowe’s avait toutefois respecté sa promesse. « Nous avons consolidé sur la Rive-sud de Montréal l’ensemble de nos opérations canadiennes », a soutenu Valérie Gonzalo par courriel.