Le Journal de Quebec

Défi de fin de campagne du Bloc

- RICHARD MARTINEAU

« You are the wind beneath my wings », chantait Bette Midler à son amie dans le drame lacrymal Beaches.

Traduction : tu es le vent sous mes ailes. Grâce à toi, j’ai pu prendre mon envol. Je n’aurais jamais atteint de tels sommets si tu n’avais pas été là.

Le chef du Bloc Yves-françois Blanchet, qui a une voix de stentor faite sur mesure pour les karaokés du vendredi soir, pourrait dédier cette chanson aux commentate­urs et analystes canadiens-anglais.

Car soyons sérieux : si ce n’était de leurs attaques incessante­s et mesquines contre la loi 21 et les millions de Québécois qui l’appuient, pas sûr que le Bloc (que l’on disait mort et enterré il y a quelques mois à peine) connaîtrai­t un tel succès aujourd’hui. Certes, M. Blanchet, un communicat­eur redoutable, a livré une performanc­e plus qu’honorable lors des débats des chefs.

Mais redonnons au Globe and Mail, à la CBC et au National Post ce qui leur appartient : si l’élite politicomé­diatique canadienne-anglaise n’avait pas soufflé aussi puissammen­t sur les braises du nationalis­me québécois, le feu n’aurait peut-être pas pris.

Ajoutez à cela deux chefs particuliè­rement anémiques, l’un (Trudeau) toujours pris dans les cordes et l’autre (Scheer), incapable de porter un coup fatal à son adversaire, et vous avez un Bloc qui paraît plus fort qu’il ne l’est réellement. Comme on dit : il est puissant parce que les autres sont faibles.

Combien de gens s’apprêtent à voter pour le Bloc juste pour remettre le Canada anglais à sa place et lui dire de se mêler de ses affaires ?

CHANGEZ DE SUJET, SVP !

C’est d’ailleurs le gros défi d’yves-françois Blanchet dans le dernier droit de cette campagne : démontrer que voter pour le Bloc n’est pas juste un geste symbolique.

Que son parti, s’il a suffisamme­nt d’élus, peut aller chercher des gains réels pour le Québec.

On dirait d’ailleurs que le chef du Bloc a hâte de parler d’autres choses que de la loi sur la laïcité (un sujet qui, pourtant, l’aide). Il trépigne, tape du pied…

Quelqu’un veut m’interroger sur l’environnem­ent ? L’économie ? Les pensions de vieillesse ? N’importe quoi sauf les maudits signes religieux ! L’avenir du secteur de la cordonneri­e ? Les bienfaits de la diète cétogène ? Le dernier match du Canadien ? Savourons l’ironie de la situation.

En effet, comme m’a dit mon confrère Steve E. Fortin sur les ondes de QUB radio hier : « Habituelle­ment, on dit que ce sont les souveraini­stes qui ne cessent d’instrument­aliser les questions identitair­es à des fins électorali­stes. Or, cette fois-ci, ce sont les Canadiens anglais qui ne cessaient de taper sur ce clou ! » Observatio­n juste.

C’est pourtant une loi aussi vieille que Sun Tzu et Machiavel : « Fesse sur ton ennemi, mais pas trop fort, car tu risques de le faire passer pour un martyr… »

RAVIVER LE FEU

Regardez ce qui se passe actuelleme­nt en Catalogne. À force de vouloir étouffer le mouvement séparatist­e catalan, les autorités espagnoles sont en train de le rendre plus fort !

Certes, la situation n’est pas la même ici, loin de moi l’idée de faire un rapprochem­ent… Mais la leçon est la même: à force de souffler sur le feu pour l’éteindre, tu finis par le raviver !

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