Le Journal de Quebec

L’image de Trudeau barbouillé­e

- mario.dumont@quebecorme­dia.com

J’ai rarement vu l’image d’un leader politique au pouvoir être aussi triturée au cours d’une campagne électorale. Il faut dire que Justin Trudeau avait beaucoup misé sur l’image pour triompher. Tout le Parti libéral avait d’ailleurs misé sur la popularité du leader pour assurer son succès. La boulette !

Celui que le public décrivait spontanéme­nt comme le type à la mode, sympathiqu­e, dynamique, se voit désormais décrit comme superficie­l, caméléon et peu fiable. Ceux qui n’ont jamais aimé le chef libéral diront que celui qui a triomphé par l’image périra par l’image. Ses supporters le diront victime d’attaques vicieuses.

Mais les uns et les autres se surprennen­t du caractère foudroyant de la détériorat­ion de son image publique.

SI BEAU EN 2015

Dans cette campagne, j’ai été personnell­ement frappé par la réaction sévère du public à certaines mises en scène de Justin Trudeau. En 2015, lorsqu’il avait fait du canot ou de la boxe, il bénéficiai­t d’une réaction publique hautement favorable.

On comparait son côté détendu à la rigidité d’un Stephen Harper. Les uns tombaient sous le charme de sa fière allure, les autres admiraient son caractère sportif. Tout cela se faisait dans le sourire et finissait par un selfie.

Les mêmes gestes, quatre ans plus tard, ne produisent plus les mêmes effets. Lorsque Justin Trudeau est allé faire un entraîneme­nt de boxe le matin d’un débat, on entendait murmurer : « c’est quoi, ce théâtre ? », « en quoi s’est-il déguisé aujourd’hui ? » ou « il devrait plutôt étudier ses dossiers ».

TROP, TROP, TROP

Pourquoi ce changement de perception ? Je crois tout simplement que Justin Trudeau a exagéré. Trop de mises en scène, trop de costumes, trop de moments où le public a senti que l’image a pris le dessus sur le fond. Lors du voyage en Inde, la coupe a débordé. Ses conseiller­s (et lui-même) auraient dû réaliser qu’ils avaient étiré l’élastique et éviter tout élément théâtral en campagne.

La semaine où furent révélées ses photos de Blackface a aussi été révélatric­e. Voyant ces photos vieilles de plusieurs années, la plupart des gens, incluant des adversaire­s politiques, se sont portés à sa défense en soutenant qu’il ne pouvait pas être considéré comme raciste.

Curieuseme­nt, ce n’est pas du tout sur ce front que le chef libéral a subi des dommages. Ce qui en est ressorti, c’est plutôt : « encore un déguisemen­t ? » Comme une pièce de plus au dossier de sa crédibilit­é mise à mal.

Andrew Scheer et Jagmeet Singh, ainsi que leurs stratèges, ont perçu la faiblesse. Ils ont frappé à bras raccourcis non pas sur l’équipe libérale ou le bilan libéral, mais sur l’image de Justin Trudeau. Scénario d’horreur pour les libéraux : l’image du chef qui devait être la force de la campagne en devient la faiblesse. Pas facile de s’ajuster en trois semaines.

Justin Trudeau est en danger. S’il perd lundi, il saura pourquoi. S’il est réélu, il saura qu’il doit maintenant travailler sur du solide.

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MARIO DUMONT e Blogueur au Journal Économiste, animateur et chroniqueu­r
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Justin Trudeau est sur la corde raide en cette fin de campagne parce qu’il a misé beaucoup sur son image… une image mise à mal.

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