Le Journal de Quebec

Les 10 minutes les plus effrayante­s de sa vie

Un aide-pêcheur de la Gaspésie reste traumatisé après être tombé à l’eau lors d’une sortie en mer

- STÉPHANIE GENDRON

Un aide-pêcheur gaspésien qui est tombé à l’eau lors d’une sortie en mer à la pêche au homard garde encore des séquelles physiques et mentales de l’événement traumatisa­nt.

Pendant de longs mois après l’incident, Alain Boulanger, 60 ans, de Gaspé, a fait le même cauchemar : il tombait à l’eau et se trouvait seul sans apercevoir le bateau duquel il était tombé. C’est exactement ce qui s’est produit le 25 mai 2016, au large de Percé, en Gaspésie.

M. Boulanger venait de prendre sa retraite comme préposé aux bénéficiai­res lorsqu’il a accepté d’agir comme aide-pêcheur pour un ami, le temps de la saison de la pêche, en 2016.

Le jour de l’événement, l’équipage retournait au quai après avoir pêché les homards et il s’affairait à ramasser du cordage. Une vague de fond a frappé le bateau, et l’homme est tombé par-dessus bord, heurtant le bateau.

« Je me rappelle seulement d’être sur le bateau, puis sous l’eau. Je ne comprenais rien », se souvient Alain Boulanger. « Au début, je ne voyais pas le bateau, il a fallu que je tourne sur moi-même avant de le voir. »

LAISSER COULER

Il a crié, mais l’équipage composé de trois personnes ne l’entendait pas, alors qu’on tentait de le localiser après l’avoir vu tomber. Il n’a jamais réussi à enlever ses bottes, qui le faisaient couler au fond de l’eau.

« Je voyais le bateau, mais il me paraissait tellement loin, j’ai décidé un instant de me laisser couler, car je ne pensais pas pouvoir nager jusqu’à lui », raconte-t-il.

L’aide-pêcheur a finalement puisé dans l’énergie qui lui restait et a senti une corde toucher sa main. On l’avait finalement récupéré. Selon lui, il est resté dans l’eau à environ 6 °C pendant une dizaine de minutes, une éternité à son souvenir.

Il est revenu au bord sur ses deux pieds, mais frigorifié. Encore sur l’adrénaline, il a décidé de prendre son véhicule pour retourner à la maison. Il se rappelle s’être arrêté à mi-chemin pour pleurer toutes les larmes de son corps.

Après avoir rapporté l’événement à la CNESST, il s’est fait évaluer par un médecin. On lui a diagnostiq­ué une hernie discale, des étirements à la cuisse et à la fesse, une atteinte à un nerf de la cuisse, ainsi qu’un syndrome de stress post-traumatiqu­e, entre autres.

SE REMETTRE SUR PIED

« Avant, il y avait Alain le fonceur. Aujourd’hui, ce n’est plus le Alain d’avant. Jamais je n’aurais pensé que ça pouvait arriver. En Gaspésie, on est né sur l’eau, on jouait sur les bateaux », se désole-t-il. Après trois ans, il se porte relativeme­nt mieux. Il a fait beaucoup de cauchemars et de crises de panique, surtout lorsqu’il passait en voiture non loin du quai où le bateau duquel il est tombé prenait son départ.

L’aide d’une psychologu­e lui a permis de se remettre sur pied, en allant marcher avec lui sur des quais. Toutefois, il ne prend plus plaisir à aller à la pêche.

Les impacts physiques se font aussi sentir. Il ne peut plus pelleter la neige, couper le bois de sa nouvelle terre ou tondre le gazon. Mais il se dit heureux de pouvoir raconter son histoire, n’y ayant pas laissé sa vie.

« JE ME RAPPELLE SEULEMENT D’ÊTRE SUR LE BATEAU, PUIS SOUS L’EAU. »

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PHOTOS COURTOISIE Alain Boulanger travaillai­t comme aide-pêcheur lorsqu’il est tombé par-dessus bord.

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