Le Journal de Quebec

L’éléphant royal

Blogueur au Journal

- ANTOINE ROBITAILLE antoine.robitaille@quebecorme­dia.com

La monarchie, chez nous, c’est l’éléphant dans la pièce.

Sa présence est massive (sociétés, procureurs « de la Couronne »), quotidienn­e (nos 20 $), déterminan­te (la puissance impériale du fédéral vient de là)… Mais on ne la voit pas.

Parfois, un événement comme cette décision surprenant­e du prince Harry et de son épouse Meghan de prendre leurs distances avec le faste royal, et même de déménager une partie de l’année dans notre Dominion, permet de braquer les projecteur­s sur cet aspect pratiqueme­nt « impensé » (comme diraient les universita­ires) de la fédération.

L’APRÈS-LIZ

Certes, le débat sur l’abolition surgit périodique­ment. Le gouverneme­nt Chrétien, en 1998, avait lancé l’idée : pour marquer le passage à l’an 2000, le Canada se proclamera­it république.

Le ministre John Manley l’avait défendue courageuse­ment. Le rejet avait été véhément dans le ROC ( rest of Canada), alors qu’au Québec, elle avait suscité un intérêt amusé.

Le Megxit nous force au fond à devancer la réflexion sur l’après-elizabeth II. L’actuelle souveraine fonde en grande partie l’appui actuel à la monarchie britanniqu­e. On peut parier qu’une fois « Liz » partie, l’envie de prendre ses distances avec ce régime gagnera bien des sujets du Dominion.

Les éditoriaux frontaleme­nt opposés des deux grands journaux de Toronto, le Globe and Mail et le Toronto

Star, ces derniers jours, montrent toutefois que le débat ne sera pas simple.

Le Globe vantait une sorte de monarchie « virtuelle » canadienne, capable de conserver un lien avec celle du RoyaumeUni, mais en la gardant à distance. Les membres de la famille royale peuvent bien venir visiter le Canada, mais s’ils décident de s’installer ici, cela change tout, pestait le Globe, qui enjoignait le gouverneme­nt Trudeau à refuser carrément l’installati­on de Meghan et Harry ici !

Le Star, au contraire, estimait celle-ci éminemment souhaitabl­e en soulignant l’appui de 60 % des sujets canadiens à l’idée de faire de Harry le gouverneur général du Canada ! Les jeunes appuient cette propositio­n, exultait le Star.

MONARCHIE-PHOBIE

Évidemment, au Québec, l’appui à un tel scénario – comme celui pour la monarchie tout court – est beaucoup plus bas.

D’où la réaction de François Legault, qui disait hier s’opposer fermement au financemen­t, par les contribuab­les d’ici, de la sécurité de Meghan et Harry. Facile d’imaginer la nausée qu’une telle possibilit­é doit déclencher chez le qsiste Sol Zanetti, lui qui s’était déclaré « souillé à jamais » après avoir dû prêter serment à la reine en 2018.

Mais signe des temps, le Parti libéral du Québec, par l’entremise de son député Gregory Kelley, a déjà réservé une motion critique à l’égard de la monarchie. On n’en connaîtra la teneur exacte que lorsque l’assemblée nationale reprendra ses travaux en février.

L’appui unanime de la chambre ne sera pas difficile à obtenir : l’antimonarc­hisme du PQ est bien connu, un sentiment présent à la CAQ, laquelle avait inscrit à son « Nouveau projet nationalis­te » de 2015 l’abolition du poste de lieutenant-gouverneur.

Qui sait ? C’est peut-être le pachyderme royal qui forcera le Dominion à rouvrir sa constituti­on.

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Qui sait ? C’est peut-être le pachyderme royal qui forcera le Dominion à rouvrir sa constituti­on.

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