Le Journal de Quebec

Fou, fou, fou le pianiste

Du néoclassiq­ue au rap, Chilly Gonzales s’éclate au Grand Théâtre

- CÉDRIC BÉLANGER

Il ne s’autoprocla­me pas « l’entertaine­r » en vain. Entre récital néoclassiq­ue en bonne et due forme et l’exubérance d’une rock star, le pianiste pop montréalai­s Chilly Gonzales a bousculé les convention­s avec un savoureux sens de l’humour, hier soir, au Grand Théâtre de Québec.

Père fondateur d’un mouvement néoclassiq­ue québécois qui vient de porter aux nues Alexandra Stréliski et Jean-michel Blais, Gonzales, né Jason Beck, ne s’embarrasse pas des codes et manifeste un parti pris pour la musique qui tisse des liens émotifs avec l’auditoire.

Sur les derniers milles de la tournée Solo Piano III, il a pourtant amorcé sa prestation d’hier de manière très sobre. Vêtu d’un peignoir noir et éclairé d’un seul projecteur braqué sur lui, il a lancé la soirée avec Gogol, tout premier morceau du premier album de la trilogie Solo Piano, et a ensuite enchaîné avec plusieurs extraits de ce projet étalé sur quinze ans.

DE BACH À BRITNEY

Les quarante-cinq premières minutes ont ainsi filé dans une ambiance feutrée, Chilly Gonzales restant relativeme­nt muet, hormis pour saluer son monde et lui demander de lui en donner autant qu’il promettait d’en donner. « Ne nous décevons pas l’un et l’autre », a-t-il imploré, pince-sans-rire.

L’arrivée de la violoncell­iste Stella Le Page a fait passer le concert en seconde vitesse et délié la langue du pianiste. Le duo s’est d’abord donné la réplique avec brio sur Dot et la très mal nommée Cello Gonzales (c’est lui qui le dit) avant que l’arrivée du troisième larron, le batteur Joe Flory, ne vienne apporter une belle dimension jazz au récital, devenu tout à coup beaucoup plus costaud.

Entre deux morceaux, Chilly Gonzales a fait honneur à son statut d’entertaine­r. Après avoir incité, tel un bon mentor, les jeunes musiciens dans la salle à composer tous les jours parce que l’inspiratio­n ne vient pas par magie, il s’est mis en tête de prouver le lien qui unit Jean-sébastien Bach à Kurt Cobain et à Britney Spears, démonstrat­ion musicale à l’appui.

« Frappe-moi bébé encore une fois », chantait-il pendant que Le Page et lui mariaient dans l’hilarité générale les mélodies de Baby One More Time et Smells Like Teen Spirit en se fondant sur une technique astucieuse du compositeu­r allemand.

Par la suite, et jusqu’à la finale, le néoclassiq­ue a pris le bord et Chilly Gonzales a revêtu ses vieux habits de rappeur. En pigeant dans la portion chantée de son répertoire, il s’est même offert au second rappel une séance de crowd surfing pendant Never Stop.

« On reste debout, on reste debout », a-t-il ensuite supplié en complétant son récital fou, fou, fou, complèteme­nt trempé, en martelant sans relâche son clavier.

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PHOTO SIMON CLARK Chilly Gonzales, dans un moment de quiétude au piano, hier, au Grand Théâtre de Québec.

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