Des taux terriblement loin de la réalité
Que le taux officiel du chômage en mars ne soit que de 7,8 % au Canada et de 8,1 % au Québec… c’est farfelu, tellement c’est loin de la réalité en cette période de guerre contre la COVID-19.
À vrai dire, il faudrait vraisemblablement multiplier par deux ces taux officiels rapportés par Statistique Canada pour avoir une idée plus précise de l’impact désastreux de la pandémie du coronavirus sur l’emploi au Québec et dans les autres provinces canadiennes.
Ce qui donnerait un taux de chômage non officiel (mais ô combien plus réaliste) d’environ 15 % pour le Canada et de 16 % pour le Québec.
EXPLICATION
Officiellement, il s’est perdu en mars 1 million d’emplois au Canada.
À ce chiffre officiel, il faut ajouter 2,1 millions de personnes, dont 1,3 million qui n’ont pas travaillé et
794 000 qui ont vu leurs heures coupées de plus de la moitié.
Ce qui porte donc, selon Statistique Canada, à 3,1 millions le nombre total de Canadiens touchés par une perte d’emploi ou des heures réduites substantiellement.
Pour le Québec, Statistique Canada rapporte une perte officielle d’emplois de 264 000 pour le mois de mars. La réalité ? On devrait plutôt parler d’au moins 550 000 pertes d’emplois en mars, sinon plus.
Et dire que ça va empirer en avril. L’ampleur de l’actuelle chute d’emploi dépasse et de loin celle survenue lors des trois précédentes récessions. Tous les secteurs sont touchés, exception faite des services essentiels.
LA CONFUSION
À la décharge de Statistique Canada, il faut dire que la collecte des données sur le marché de l’emploi a été complètement chamboulée par la série d’interventions gouvernementales sans précédent effectuées depuis la mi-mars dans le cadre de la lutte à la COVID-19.
C’est pourquoi les données sur les mises à pied, les heures travaillées, les gens sans travail… sont en soi faussées.
Comme on sait, la nouvelle Prestation canadienne d’urgence (PCU) a pris la relève de l’assurance-emploi pour la période commençant le 15 mars dernier. Ce qui vient d’autant changer la cueillette des données puisque la PCU ratisse beaucoup plus large que l’assurance chômage.
En effet, la PCU est admissible à toutes les personnes victimes d’un arrêt de travail ou de gagne-pain, incluant ainsi les travailleurs autonomes et les employés n’ayant pas suffisamment d’heures de travail accumulées aux fins de l’assurance-emploi.
Autre mesure gouvernementale majeure qui change la donne de l’assurance-emploi : la mise en place par le gouvernement Trudeau de la nouvelle Subvention salariale d’urgence du Canada (SSUC), laquelle subvention couvre 75 % du salaire des employés des entreprises privées touchées par la pandémie du coronavirus. Plafonnée à 847 $/semaine par employé, cette subvention rétroactive au 15 mars dernier est en vigueur jusqu’à concurrence de 12 semaines.
La subvention a pour but d’inciter les entreprises à garder leurs employés (même s’ils ne travaillent pas) au lieu de les mettre à pied en les envoyant à l’assurance-emploi.
Par ricochet, cela signifie que des millions de travailleurs du secteur privé seront payés à ne rien faire aux crochets de l’état au lieu de se retrouver dans les statistiques de l’assurance-emploi.
L’ampleur de l’actuelle chute d’emploi dépasse et de loin celle survenue lors des trois précédentes récessions