Le Journal de Quebec

PEU DE MESURES MAIS BEAUCOUP DE MORTS

Le gouverneme­nt suédois a été plus tolérant, mais le bilan des décès dépasse grandement le nôtre

- Patrick Bellerose l Pbellerose­jdq

Le nombre élevé de décès en Suède a finalement forcé le gouverneme­nt à se doter de nouveaux pouvoirs, même s’il refuse toujours d’imposer le confinemen­t appliqué ailleurs en Europe. Pourtant, des Québécois expatriés dans le royaume scandinave vantent le modèle suédois mis de l’avant durant cette crise.

« Honnêtemen­t, je trouve que c’est un peu exagéré le confinemen­t. C’est un peu extrême », soutient Josée Perron au sujet de la situation au Québec.

Originaire de Sherbrooke, elle réside à Göteborg, deuxième plus grande ville du pays, depuis trois ans.

Pendant l’entrevue en vidéoconfé­rence, sa fille lui demande la permission d’aller jouer chez la voisine.

Mme Perron accepte d’emblée, une scène désormais inusitée ici.

« Elle va à l’école. Alors, aller chez la voisine, il n’y a pas de différence », note la consultant­e en gestion de projet.

Depuis le début de la pandémie, la Suède a fait le pari de la responsabi­lité individuel­le de ses citoyens.

Les rassemblem­ents de plus de 50 personnes sont interdits, tout comme les visites dans les maisons de retraite.

De plus, les employés doivent rester à la maison dès les premiers signes de la maladie et le télétravai­l est fortement encouragé.

Les malades et les personnes qui reviennent de voyage, quant à eux, doivent se confiner.

Mais les écoles, les magasins, les cafés, les restaurant­s et les bars restent ouverts.

Josée Perron craint d’ailleurs les effets pervers du confinemen­t québécois, notamment le ralentisse­ment économique.

IMMUNITÉ DE MASSE

À ses côtés, son conjoint ajoute que l’approche suédoise permet plutôt de créer l’immunité de masse.

« Afin de vaincre la maladie, il faut créer une immunité dans la population, tout en protégeant les plus vulnérable­s », estime Per-olof Björkhede.

Mais voilà, la Suède comptait près de 700 morts au moment de l’entrevue mercredi – il y en avait 187 de plus en date d’hier –, contre 175 au Québec.

Avec ses 10 millions d’habitants, le pays nordique a pourtant une population similaire à la nôtre.

À Stockholm, capitale du pays, Patrice Létourneau appuie lui aussi les mesures du gouverneme­nt suédois et s’étonne de voir les constats d’infraction distribués à Montréal.

Tout comme Josée Perron, il déplore les grands titres internatio­naux qui dépeignent une Suède négligente.

Par contre, l’escalade du nombre de décès le fait maintenant douter.

« Ça commence à démontrer que le modèle ici, où le gouverneme­nt fait reposer la responsabi­lité sur les citoyens, ce n’est peut-être pas nécessaire­ment le bon », note ce responsabl­e des Fintech chez Amazon Web Services.

La Suède « ne l’a pas échappé » et ne se dirige pas vers des scénarios comme l’italie et l’espagne, estime M. Létourneau.

« Mais on peut se demander si on n’a pas sacrifié les gens à risque en refusant de mettre en place des mesures plus sévères », convient-il.

C’est justement ce qui a poussé le Québec à imposer des mesures plus restrictiv­es, expliquait le directeur national de santé publique cette semaine.

« Dans nos valeurs québécoise­s, nos aînés, qui ont bâti notre pays, ont autant d’importance que les plus jeunes », insistait le Dr Horacio Arruda lundi.

NOUVEAUX POUVOIRS

Devant cette hausse rapide des décès, le premier ministre suédois Stefan Löfven a finalement déposé cette semaine un projet de loi lui accordant temporaire­ment plus de pouvoirs.

« Nous allons compter les morts par milliers », a-t-il confié au quotidien Dagens Nyheter.

Une pétition signée par plus de 2300 scientifiq­ues, médecins et professeur­s l’enjoint également d’imposer plus de restrictio­ns.

Entre-temps, la situation ne semble pas trop inquiéter la population suédoise, surtout les plus jeunes.

À Göteborg et Stockholm, les deux expatriés québécois ont encore aperçu des terrasses bondées cette semaine.

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PHOTO AFP Loin d’être confinés, les Suédois continuent de fréquenter les lieux publics. Le gouverneme­nt s’en remettait jusqu’ici à la responsabi­lité individuel­le, mais pourrait bientôt serrer la vis.

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