Le Journal de Quebec

« Les soins intensifs, ce n’est pas une balade dans le parc »

Un intensivis­te du CHUM prévient que les plus jeunes sont aussi à risque

- MAUDE OUELLET

Même si la COVID-19 a surtout fauché des aînés jusqu’ici, de plus en plus de jeunes patients risquent tout de même de passer un « sale quart d’heure » aux soins intensifs, prévient un intensivis­te du CHUM.

« Ce n’est pas parce qu’on ne décède pas que ce n’est pas dangereux », lance d’entrée de jeu le Dr Michaël Chassé.

Depuis plusieurs semaines, le spécialist­e est en première ligne pour traiter des patients ayant développé des complicati­ons de la COVID-19.

Parmi eux, plusieurs sont âgés de moins de 60 ans. Même si la plupart s’en tirent, les conséquenc­es d’un séjour aux soins intensifs restent graves.

« Les soins intensifs ce n’est pas une balade dans le parc. Ce sont des traitement­s agressifs. Cela veut dire être branché sur des machines, avoir un cathéter et parfois être dans le coma, précise le Dr Chassé. Les gens sont très affaiblis et doivent souvent réapprendr­e à manger et à marcher quand ils reprennent du mieux. »

Le premier ministre François Legault a affirmé la semaine dernière que 99 % des victimes succombant au virus sont âgées de plus de 60 ans, mais cette statistiqu­e a déjà changé. Pour le moment, les moins de 60 ans représente­nt 7 % de tous les décès et ce chiffre pourrait passer à 10 % ou à 15 % dans les prochaines semaines indique le Dr Chassé.

COMME AU ROYAUME-UNI

Selon une étude de l’intensive Care National Audit and Research Center (ICNARC), le taux de mortalité chez les patients admis aux soins intensifs est de 23 % chez les 16-49 ans au Royaume-uni.

L’intensivis­te s’attend à un scénario similaire au Québec en raison des ressemblan­ces avec le système de santé québécois.

« Nous ne sommes pas meilleurs qu’ailleurs. Les patients plus jeunes atteints de COVID-19 sont encore aux soins intensifs. Je ne les laisserai pas partir facilement. Cela va prendre plusieurs semaines avant de conclure qu’il n’y a plus rien à faire », affirme le médecin spécialist­e.

Les moins âgés pourraient donc prendre plus de temps à s’ajouter au bilan total. Pour le moment, ils représente­nt plus du tiers de tous les cas admis aux soins intensifs au Canada.

DES SÉQUELLES ENCORE MÉCONNUES

Le coronaviru­s peut laisser des séquelles, notamment à ceux qui ont développé un syndrome de détresse respiratoi­re de l’adulte (SDRA).

« Une certaine proportion de personnes atteintes du SDRA ont tendance à voir leur capacité pulmonaire diminuer dans les années suivantes. Elles sont plus fatiguées à l’effort. Leurs reins peuvent aussi être atteints, elles peuvent donc avoir besoin de dialyse pendant quelques semaines », explique celui qui pratique la médecine depuis huit ans.

C’est sans parler des conséquenc­es qui sont encore méconnues. « La COVID-19 est une maladie assez nouvelle, dit le médecin. On ne connaît pas précisémen­t les séquelles à long terme qu’elle pourrait laisser. »

Selon ce qu’a pu observer le Dr Chassé, les Québécois respectent assez bien les consignes des autorités. « Nous sommes encore capables de traiter les patients de manière optimale. Nous sommes en mesure de bien les prendre en charge et nous avons les équipement­s nécessaire­s pour le faire. »

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PHOTO CHANTAL POIRIER Le Dr Michaël Chassé, intensivis­te du CHUM, est en première ligne pour traiter des patients ayant développé des complicati­ons de la COVID-19. Parmi eux, plusieurs sont âgés de moins de 60 ans.

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