Au coeur de la crise avec Chantale Giguère
Désignée à quelques reprises par le maire de Québec comme « la Horacio Arruda de la Ville de Québec », Chantale Giguère, coordonnatrice municipale de la sécurité civile, est plongée depuis le début de mars au coeur de la gestion de crise du coronavirus.
Le 11 mars, Chantale Giguère devait s’envoler avec son mari pour le Japon. Comme le voyage avait lieu en Asie, elle surveillait de très près ce qui s’y passait en lien avec le coronavirus, et ce dès le début d’année.
« Nous sommes des aventuriers et des voyageurs aguerris, mais c’était intuitif, je sentais qu’il allait se passer quelque chose », raconte-t-elle en entrevue avec Le Journal de Québec.
Puis, au fil des semaines, Mme Giguère a réalisé qu’il y avait de fortes chances qu’on se dirige vers ce qu’on désigne, en sécurité civile, comme une situation d’exception. En matière de plan d’urgence, elle s’y connaît pour avoir développé le modèle dans le cadre de sa maîtrise à L’ENAP.
ÉTAT D’URGENCE
Le dimanche 8 mars, après avoir annulé son voyage même s’il n’y avait pas encore d’interdiction,
Mme Giguère a donc contacté Carolyne Larouche, directrice du bureau de sécurité civile à Québec, pour l’aviser de ce qu’elle appréhendait.
Quelques jours plus tard, le gouvernement du Québec déclarait l’état d’urgence sanitaire sur tout le territoire, et enclenchait de façon progressive des restrictions dans les déplacements, en plus de fermer les commerces offrant des services jugés non essentiels.
À la Ville de Québec, on a vite statué que le rôle à jouer n’en était pas un de premier plan, mais plutôt de soutien envers le gouvernement et les autorités de santé publique.
On a déclaré aussi la situation d’urgence, et la meilleure chose qu’on a appliquée, estime Mme Giguère, ç’a été de s’aligner sur les directives de la santé publique. « On les a suivies à la lettre, et ç’a mis de la rationalité dans nos décisions », explique la coordonnatrice, qui s’entretient deux à trois fois par jour avec le Dr François Desbiens, directeur de santé publique pour le CIUSSS de la Capitale-nationale.
STRUCTURE DE CRISE
Avec M. Labeaume, ça se passe très bien, dit-elle. Tous deux proviennent du privé, et parlent le même langage, évoque celle qui a d’abord fait carrière dans le domaine des télécommunications. « Mon travail, c’est de comprendre son objectif, et ensuite, il me donne la latitude décisionnelle et opérationnelle pour faire progresser les dossiers. »
La structure d’organisation de la Ville continue d’exister, en situation d’exception avérée, mais avec en plus une structure dédiée à la gestion de crise. Une centaine de personnes travaillent avec eux, certains dans le volet intervention, et d’autres au niveau de la réflexion pour les suites de la crise, à tous les niveaux, y compris économiques.
Tout comme le maire, Mme Giguère s’inquiète beaucoup des effets psychosociaux de la crise, avec tout l’isolement généré. « Je pense qu’il va y avoir de nouvelles clientèles vulnérables », déplore-t-elle.
POPULATION ORDONNÉE
Quant à la population, la coordonnatrice constate une excellente collaboration. Pour le vérifier, elle marche beaucoup à travers la ville, pour se rendre au travail notamment, et elle a aussi pris la peine de visiter quelques parcs et espaces publics extérieurs, ces dernières semaines.
« Les gens se comportent vraiment bien, et il y a d’ailleurs eu très peu de contraventions à Québec », se réjouit-elle.
Pour la suite, Mme Giguère ne voit pas le jour où elle pourra revoir sa mère, qui est âgée de 85 ans, ses deux grands enfants, ni même sa première petite-fille, née il y a quatre mois.
BOURREAU DE TRAVAIL
En attendant, celle qui est reconnue comme un bourreau de travail est à pied d’oeuvre, et ce, presque sans relâche depuis le début de la crise. Arrivée en 2005 comme directrice des ressources humaines, elle occupe aujourd’hui les fonctions de directrice générale adjointe à la qualité de vie urbaine, ce qui englobe divers chapeaux, dont la sécurité civile.
Le maire de Québec a dû insister beaucoup pour qu’elle consente à quelques congés à Pâques. « Je lui ai ordonné de rester chez elle pendant quatre jours. Je trouvais que c’était le temps qu’elle se repose, mais elle a travaillé quand même », me disait M. Labeaume cette semaine en entrevue.
À l’évocation de cette anecdote, elle rit de bon coeur. « Y a-t-il quelque chose de plus noble que de travailler pour le citoyen ? » demande-t-elle avant de prendre congé et d’accourir vers la prochaine réunion de la cellule de crise.