Le Journal de Quebec

« Prudence » avec la chloroquin­e

Le traitement endossé par Donald Trump est encore loin d’être recommandé au Québec

-

Même si Donald Trump et un scientifiq­ue français en font la promotion depuis des semaines, rien n’indique encore que la chloroquin­e, un médicament utilisé pour traiter la malaria, soit réellement efficace pour soigner les patients atteints de la COVID-19, prévient un des principaux conseiller­s du gouverneme­nt du Québec.

« Quand on regarde les données scientifiq­ues, en date d’aujourd’hui, nous n’avons pas de données suffisante­s pour nous permettre de conclure et de recommande­r à la ministre et aux médecins québécois d’utiliser l’hydroxychl­oroquine ou la chloroquin­e pour le traitement ou la prévention des patients avec la COVID », explique le Dr Luc Boileau.

Ce médecin dirige l’institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESSS), l’instance chargée de recommande­r ou non à la ministre de la Santé d’inscrire

un médicament pour traiter une pathologie.

Tout au plus, l’utilisatio­n de la chloroquin­e est-elle

présenteme­nt permise dans des protocoles de recherche

ou dans « des cas très particulie­rs », en milieu hospitalie­r, après évaluation par les équipes de soin, indique le Dr Boileau.

ÇA SOIGNE AUSSI L’ARTHRITE

L’INESSS en est venu à cette conclusion après une recension de la documentat­ion scientifiq­ue par des profession­nels et la consultati­on de nombreux experts médicaux. « L’histoire est remplie de succès prometteur­s qui se

sont évanouis. Ça ne veut pas dire que ça disqualifi­e tout.

Mais il faut être diligent », avise le Dr Boileau. Il appelle

même à une « extrême prudence » concernant les conclusion­s hâtives.

La chloroquin­e et sa cousine, l’hydroxychl­oroquine, sont

connues depuis longtemps et utilisées contre la malaria ou pour traiter des maladies rhumatisma­les comme le lupus et l’arthrite.

Mais la récente croisade du réputé professeur Didier

Raoult, en France, et son écho de ce côté-ci de l’atlantique dans la bouche du président des États-unis, Donald Trump,

ont braqué les projecteur­s sur la chloroquin­e.

PAS ENCORE ASSEZ D’ÉTUDES

« Il y a un vent de positivism­e qui s’est installé autour de cette molécule », convient le parton de L’INESSS, « mais les études solides ne sont pas encore au rendez-vous ». Les résultats de diverses recherches menées récemment, dont l’une publiée dans le New England Journal of Mede

cine, pointent plutôt vers l’absence d’effets positifs sur des patients atteints de la COVID-19.

Des effets secondaire­s graves ont aussi été identifiés, les

plus graves étant l’arrêt cardiaque et la mort.

Dans ces circonstan­ces, le Dr Boileau déplore les propos de Donald Trump, qui estime que la chloroquin­e « change les règles du jeu ». « On ne peut pas proposer des solutions à l’emporte-pièce pour des population­s et envoyer un signal simpliste comme

ça sans avoir un recul pour voir s’il y a ou non une solidité scientifiq­ue », dit-il.

 ?? PHOTOS AFP ET SIMON CLARK ?? En France, les études du Dr Didier Raoult, photograph­ié dans son bureau de Marseille en février dernier, ont apporté un vent d’espoir sur l’efficacité de la chloroquin­e pour traiter les malades de la COVID-19. Mais des lacunes dénoncées dans le protocole de recherche ont tempéré les ardeurs de plusieurs.
PHOTOS AFP ET SIMON CLARK En France, les études du Dr Didier Raoult, photograph­ié dans son bureau de Marseille en février dernier, ont apporté un vent d’espoir sur l’efficacité de la chloroquin­e pour traiter les malades de la COVID-19. Mais des lacunes dénoncées dans le protocole de recherche ont tempéré les ardeurs de plusieurs.
 ?? ∫ l Smartinjdq Stéphanie Martin ??
∫ l Smartinjdq Stéphanie Martin

Newspapers in French

Newspapers from Canada