Les syndicats ne sont pas la bonne cible
Le premier ministre avait réussi à bien soigner son plan de communication depuis le début de la crise du sanitaire. La bombe du CHSLD Herron a cependant miné plusieurs efforts en révélant dramatiquement aux Québécois le sort peu enviable réservé à nos aînés.
Ces faits accablants l’ont amené à créer quelques distractions en faisant porter la faute sur d’autres acteurs sociaux.
C’est ainsi que les médecins spécialistes et les syndicats ont servi à gommer l’incurie gouvernementale et à adoucir son mea culpa.
SORTIR DU SIMPLISME
Suivant l’adage, une faute avouée est à demi pardonnée, monsieur Legault a pris sur ses épaules la bataille perdue dans les résidences pour aînés. Il a dit regretter de ne pas avoir haussé plus rapidement la rémunération des préposés aux bénéficiaires tout en disant que c’était à cause des syndicats. Il s’est même reproché de ne pas avoir décrété.
Le constat s’avère simpliste et fait abstraction de problèmes beaucoup plus sérieux à l’origine de la décrépitude des conditions de vie de nos aînés.
L’acte de contrition du premier ministre serait apparu plus sincère s’il avait admis que la multiplication des places en résidence privée pour les personnes en perte d’autonomie avait contribué grandement à cette dégradation.
J’aurais été encore plus convaincu s’il avait reconnu ne pas avoir désigné la personne adéquate comme ministre responsable des aînés.
Madame Marguerite Blais a assumé cette responsabilité dans un gouvernement libéral qui a été largement tributaire des dégâts constatés maintenant. Aujourd’hui, elle continue d’agir avec un gouvernement caquiste qui peine à se détacher d’une tendance à la marchandisation des soins de santé pour les aînés.
Cocasserie de l’histoire, madame
Blais était aux côtés de monsieur Charest lors d’une conférence de presse tenue à la résidence Herron pendant la campagne électorale de 2012. Le chef libéral annonçait sa volonté d’ajouter 1000 places dans les résidences privées pour personnes âgées.
Plusieurs de ces résidences sont aujourd’hui sous surveillance de l’état à cause de la propagation du coronavirus.
DOMMAGES COLLATÉRAUX
À la lumière de ces constats, les syndicats ont bien peu à se reprocher pour la pénurie de main-d’oeuvre déplorée aujourd’hui. La hausse de rémunération pour les préposés aux bénéficiaires travaillant dans le secteur public n’aurait pas pallié les carences observées dans le secteur privé.
D’autre part, l’appel aux médecins spécialistes pour venir à la rescousse des CHSLD reflète une certaine panique qui pourrait avoir de lourdes conséquences.
En voulant renforcer la capacité d’intervention dans les CHSLD, le gouvernement risque d’affaiblir la capacité de réponse dans les hôpitaux si ces médecins sont infectés.
Je terminerai cette chronique en levant mon chapeau à tous les journalistes qui ont une tâche particulièrement délicate en cette période de guerre contre la COVID-19.
Rapporter les faits, sans être la courroie de transmission de l’état et en maintenant la confiance dans les moyens dessinés par nos institutions pour combattre l’épidémie, est un art qui mérite toute notre admiration !