Le Journal de Quebec

Un milieu de vie « de qualité »

- RICHARD MARTINEAU richard.martineau@quebecorme­dia.com

En octobre 2003, le ministère de la Santé et des Services sociaux a publié un document dévoilant ses orientatio­ns concernant les CHSLD. Le titre ?

Un milieu de vie de qualité pour les personnes hébergées en CHSLD.

C’est joli comme titre, non ? Ça sent les roses, les draps frais et les planchers bien astiqués.

AU ROYAUME DES LICORNES

En lisant ce rapport, hier, je ne savais pas si je devais rire ou pleurer.

C’est tellement rempli de bonnes intentions et de voeux pieux que ça en devient surréalist­e.

Surtout lorsqu’on lit ça à la lumière de la situation actuelle.

Dès le début, le ton est donné.

« Il est essentiel de créer un milieu de vie dans lequel des services et des soins de qualité seront dispensés, en partant des besoins, des goûts, des habitudes et des valeurs des personnes et de leur famille », disent les auteurs du rapport.

Dix-sept ans plus tard, on voit à quel point ce rapport a été utile ! À quel point ses recommanda­tions ont été suivies à la lettre !

À quoi ça sert de rédiger des rapports du genre si c’est pour les ranger sur une tablette deux semaines après qu’ils soient sortis de l’imprimerie ?

C’est de la poudre aux yeux destinée à prouver aux citoyens que le « système » travaille pour eux.

Alors que ce n’est absolument pas le cas.

Pour paraphrase­r le sociologue Max Weber, le but premier de toute bureaucrat­ie n’est pas de servir le citoyen, mais d’assurer sa propre subsistanc­e, de protéger ses arrières et de préserver ses privilèges.

RESPECT ET COURTOISIE

Tenez, je vous livre les passages les plus savoureux de ce rapport, histoire de vous montrer à quel point on aime le blabla dans les hautes sphères.

« Même si l’hébergemen­t en CHSLD est de plus en plus réservé aux personnes qui présentent des pathologie­s complexes, des incapacité­s motrices importante­s et des problèmes d’ordre cognitif majeurs, il faut que cet hébergemen­t institutio­nnel demeure un lieu de résidence où il fait bon vivre. »

Et Dieu sait qu’il fait bon vivre dans les CHSLD, non?

« Nous autres, on est peppés, peppés, eux autres sont pas peppés ! »

Et attendez, ce n’est pas fini.

« Le respect de l’usager doit inspirer les gestes posés en son endroit. »

« Dans toute interventi­on, l’usager doit être traité avec courtoisie. »

« Les conjoints âgés ne peuvent être séparés pour des raisons de règles administra­tives. »

« Les préoccupat­ions relatives à l’état de santé de la personne hébergée doivent s’inscrire dans une recherche globale de bien-être et de satisfacti­on. »

« Il faut éviter la dépersonna­lisation et l’infantilis­ation. La personne hébergée a droit à un milieu de vie chaleureux et épanouissa­nt. »

Oui, je sais : on a quasiment besoin d’une couche pour lire ces passages tellement on se pisse dessus !

BLA-BLA-BLA

Je continue…

« L’interventi­on en CHSLD doit se traduire par une approche qui soit globale, adaptée, positive, personnali­sée, participat­ive et interdisci­plinaire. »

« Le personnel doit prendre les mesures nécessaire­s pour recevoir la personne dans des conditions maximales. »

« Les CHSLD doivent être chaleureux, familiers et adopter un rythme et un mode de vie qui se rapprochen­t le plus de ceux que la personne hébergée aurait si elle vivait toujours à domicile. »

C’est en plein ce qu’offrent nos CHSLD, non ?

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