Adieu déchirant dans un stationnement
Un homme a peut-être salué sa mère pour la dernière fois avant qu’elle soit transférée d’un CHSLD à un hôpital
Couchée sur une civière, fortement amaigrie, une femme entrouvre les yeux au son de la voix de son fils. « Maman ! Maman ! Je t’aime ! Je t’aime, maman ! On est là ! » crie l’homme. La scène déchire le coeur.
Roberto Bureta semble dans un état second ; il agite les bras, marche dans toutes les directions. Il tente de trouver une logique à ce qui lui arrive. À lui, à sa mère, à sa famille.
Le claquement des portes de l’ambulance qui se referment raisonne quelques secondes plus tard. Maria Bonanno, 88 ans, prend le chemin de l’hôpital Maisonneuve-rosemont, à Montréal.
Atteinte de la COVID-19, elle souffre de graves problèmes respiratoires et ses heures sont possiblement comptées.
30 SECONDES
Les adieux d’un fils à sa mère viennent d’avoir lieu. Trente petites secondes, tout au plus.
Debout au beau milieu du stationnement du CHSLD Joseph-françois-perrault, situé dans le quartier montréalais de Saint-michel, M. Bureta regarde l’ambulance s’éloigner. Il est dans tous ses états.
« Je ne peux pas croire ! Ça ne se peut pas ! Je viens de dire adieu à ma mère parce que je ne sais même pas si je la reverrai vivante un jour », souffle-t-il, décontenancé, avant d’aller rejoindre son fils Anthony dans la voiture.
Selon les plus récentes données du gouvernement, pas moins de 93 résidents de ce centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) sont atteints du coronavirus, soit environ la moitié des aînés qui y vivent.
Il s’agit de l’un des CHSLD les plus touchés par la COVID-19 au Québec.
Maria Bonanno fait partie de cette triste statistique.
En entrevue téléphonique, le petit-fils de l’octogénaire dit ignorer si sa grand-mère pourra vaincre le virus qui a fauché la vie de centaines de personnes âgées depuis le début de la crise.
« Pour nous, les Italiens, la famille, c’est très important. Quand mon père lui a dit qu’il l’aimait et qu’on était là, c’était pour qu’elle trouve la force de se battre contre cette maladie », explique Anthony Bureta.
IMPUISSANTS
« Ma grand-mère, je suis super proche d’elle. Elle a été informée le lundi de Pâques [13 avril] qu’elle avait le coronavirus. Et depuis quelques jours, elle ne mangeait presque plus, elle a perdu beaucoup de poids », ajoute le jeune homme.
Les proches de Mme Bonanno trouvent très frustrant d’avoir été aussi impuissants face à la dégradation de l’état de santé de l’un des piliers de leur famille.
« Elle ne marchait pas très bien, mais elle avait une excellente santé mentale. Puis tout d’un coup, tout a basculé. Lorsqu’on a finalement été prévenus, son état s’était vraiment détérioré », indique le petit-fils de Mme Bonanno.