Le Journal de Quebec

Une journée avec une dépouille dans sa chambre

Un CHSLD privé sans chambre froide pour les corps

- ANTOINE LACROIX ET MICHAËL NGUYEN

Des employés d’un CHSLD privé de Laval déplorent qu’il faille parfois plus d’une journée avant que les dépouilles de patients morts de la COVID-19 ne soient ramassées par un service funéraire parce que l’établissem­ent n’est pas doté d’une chambre froide.

« J’arrive au travail et je trouve un mort sur un étage. Sauf qu’on ne l’a pas retiré de la journée. Ça me fait mal de voir ce genre de chose. On ne peut pas laisser les gens comme ça », raconte un préposé aux bénéficiai­res du centre L’eden, qui a demandé à taire son nom par peur de représaill­es.

Ce qui l’a d’autant plus choqué, c’est qu’un autre résident s’est trouvé en présence tout ce temps de son voisin de chambre décédé, « en train de se décomposer ».

« Déjà qu’il est positif au coronaviru­s, il a aussi droit d’être soigné dans des conditions décentes », dénonce cet employé.

« L’administra­tion n’a rien fait. On a avisé de la situation et rien ne s’est passé. Les corps restent dans les chambres et personne ne vient les chercher. Peut-être parce que les services funéraires sont débordés, mais ça n’excuse pas », dit une autre préposée.

Avec 45 cas de la COVID-19, le CHSLD privé L’eden figure parmi les 58 résidences au Québec où la situation est jugée critique parce que plus du quart de leurs occupants sont contaminés. L’établissem­ent est aux prises avec une explosion de cas depuis plus d’une semaine.

« Les corps sont emballés, mais ensuite il faut attendre la morgue, ça peut prendre un certain temps en effet, a expliqué Marjolaine Aubé, présidente du Syndicat des travailleu­ses et travailleu­rs du Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de Laval. Hier (mardi) matin, il y a eu deux morts. Et depuis, il y en a eu quatre autres. »

AIDE

Elle ajoute que la résidence privée a reçu l’aide du CISSS de Laval et du CHU de Québec. « On s’est organisé, ça se remet sur les rails. C’est moins pire aujourd’hui (mercredi) et on a confiance que ça va se replacer, affirme-t-elle. On n’a pas fini d’en entendre parler des CHSLD privés. Il y a des employés qui n’ont pas de masque, ça se promène entre les zones [chaudes et froides].... Ça va pas bien, ça ne peut pas continuer comme ça. »

La Résidence de L’eden n’a pas voulu commenter et a renvoyé la balle au CISSS, même si l’établissem­ent est privé.

« C’est un CHSLD privé, notre rôle est de leur donner du soutien, on fait tout ce qu’on peut, a indiqué Judith Goudreault, porte-parole du CISSS de Laval. Quand il y a un décès, c’est le CHSLD privé qui contacte le salon funéraire. »

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