Le Journal de Quebec

L’irresponsa­bilité administra­tive

- MATHIEU BOCK-CÔTÉ mathieu.bock-cote @quebecorme­dia.com Blogueur au Journal

En France, on surnomme le ministère de l’éducation (on dit là-bas l’éducation nationale) le Mammouth.

On fait ainsi référence au caractère monstrueux de son administra­tion et à sa capacité à paralyser toute réforme sérieuse par sa puissance d’inertie.

Les ministres avaient beau passer, souvent avec de bonnes idées pour restaurer l’humanisme à l’école, la machine résistait et s’entêtait dans ses lubies.

Nous connaisson­s la même chose au Québec. Et pas exclusivem­ent en éducation.

Ces jours-ci, la bureaucrat­ie de la santé est en vedette.

On découvre ses organigram­mes labyrinthi­ques et on ne peut s’empêcher de penser à la maison qui rend fou que doit traverser Astérix dans l’épreuve des douze travaux.

La bureaucrat­ie québécoise multiplie les étages – ou si on préfère, des niveaux d’irresponsa­bilité. Qui est responsabl­e de quoi ? Ce n’est pas toujours simple à savoir.

Le gouverneme­nt fait ce qu’il peut pour gérer la crise et dans les circonstan­ces, il se démène très honorablem­ent.

Mais François Legault et Danielle Mccann le laissent entendre sans le dire clairement, les consignes politiques ne sont pas toujours suivies. Un ordre est donné, mais quand et comment sera-t-il appliqué ?

Non pas par mauvaise foi, nécessaire­ment. Mais parce que la bureaucrat­ie est enfermée dans des schèmes mentaux ultra-rigides qui paralysent l’esprit.

En temps ordinaire, cela peut toujours passer et tout le monde s’habitue à ses méandres tout en redoutant de s’y perdre.

En temps de crise, cela devient grave.

On a beau vouloir tenir François Legault responsabl­e de toutes les dérives du système de santé qui se révèlent en ce moment, le fait est qu’il ne maîtrise pas chaque recoin de l’administra­tion publique et ne peut avoir accès aux informatio­ns qu’on lui cache.

OPACITÉ

Il existe une telle chose que l’opacité administra­tive. Le premier ministre, dans notre système politique, n’est pas un monarque tout-puissant et omnipotent.

La crise des CHSLD l’a frappé comme elle nous frappe tous. Elle stupéfie.

On peut toujours trouver ensuite un rapport qui cherchait à renseigner en temps réel sur une situation désastreus­e. Ce n’est pas faux. Encore doit-il se rendre sur le bon bureau pour forcer à une réaction.

N’oublions pas non plus que le gouverneme­nt doit gérer l’héritage politique désastreux des régimes précédents.

EMBONPOINT

Qu’on me comprenne bien. L’état ne peut se passer d’une administra­tion éclairée, qualifiée, capable de gérer des systèmes complexes qui prennent en charge la vie de millions de personnes.

Et il existe dans toutes les administra­tions un très grand nombre d’hommes et de femmes dévoués à la chose publique, qui font tout ce qu’ils peuvent pour servir leurs concitoyen­s.

Mais on ne peut nier non plus la tendance de l’état à faire de l’embonpoint bureaucrat­ique et à ne faire qu’à sa tête.

Dans la crise présente, François Legault est quelquefoi­s handicapé par une machine qui devrait plutôt le servir.

On en vient à croire qu’elle est même irréformab­le et se retourne contre la démocratie et le bon sens.

L’administra­tion paralyse souvent le gouverneme­nt

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