Le Journal de Quebec

L’aide médicale à mourir est menacée

- ÉRIC YVAN LEMAY

Québec craint tellement de manquer de certains médicament­s que le ministère de la Santé a commandé d’urgence un rapport pour trouver des options pour les gens qui souhaitent obtenir l’aide médicale à mourir.

Un des principaux médicament­s utilisés pour provoquer le coma profond chez les patients en fin de vie, le propofol, est également utilisé chez les patients hospitalis­és aux soins intensifs pour la COVID-19.

Il y a présenteme­nt une pénurie mondiale de ce médicament.

C’est dans ce contexte que le ministère de la Santé a demandé un avis à l’insitut national d’excellence en santé et services sociaux (INESSS).

INQUIÉTANT

Un des enjeux soulevés par les experts donne froid dans le dos.

« Dans un contexte de pénurie de produits, il est envisageab­le que des demandes D’AMM [aide médicale à mourir] aient à être reportées ou les soins palliatifs prolongés », peut-on lire dans le rapport.

Cela voudrait dire que les patients en fin de vie ne pourraient compter sur certains médicament­s pour soulager leurs souffrance­s ou décider du moment où ils veulent mourir.

L’INESSS recense quelques traitement­s alternatif­s qui pourraient être administré­s, mais les options sont limitées.

Certains d’entre eux nécessiten­t une approbatio­n spéciale de Santé Canada alors que d’autres risquent eux aussi de se retrouver en rupture de stock.

« UN SERVICE ESSENTIEL »

Pour le Dr Alain Naud, il est toutefois inadmissib­le qu’on puisse compromett­re les soins des patients en fin de vie.

« L’aide médicale à mourir reste un service essentiel. Est-ce qu’on remettrait une appendicit­e ou un accoucheme­nt ? », dit ce spécialist­e de la question.

Le Dr Naud déplore également le manque de renseignem­ents sur l’état des stocks de médicament­s dans les différents hôpitaux du Québec.

Au CHU de Québec où il pratique, il dit que le manque de propofol n’est pas à risque à court terme.

La situation est probableme­nt différente dans la région de Montréal où l’on traite plusieurs patients de la COVID-19 aux soins intensifs.

ÉCONOMIE

Avec trois ou quatre cas d’aide médicale à mourir par jour au Québec, il ne croit pas que c’est significat­if. Ce qui ne l’empêche pas de prendre des mesures pour éviter le gaspillage.

« On ménage les stocks », dit-il en expliquant que le protocole habituel nécessite huit seringues de propofol.

Depuis quelques semaines, il ne remplit que deux seringues et conserve le reste dans des fioles qui peuvent ensuite être remises à la pharmacie.

Selon lui, parmi les solutions proposées par L’INESSS, seule l’étomidate est une option valable puisque son action est très semblable à celle du propofol.

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