La crise, un électrochoc pour la justice
Premiers procès entièrement virtuels, requête d’appel en ligne, paiement sécurisé : la crise de la COVID-19 a forcé le système de justice à adopter rapidement de nouveaux outils numériques qui demeureront en place après la crise, affirme la ministre de la Justice Sonia Lebel.
Pour Mme Lebel, la fermeture des salles d’audience durant le confinement va accélérer l’adoption du projet Lexius (voir encadré), lancé il y a deux ans dans le but d’éliminer les montagnes de documents qui transforment nos palais de justice en « hangars à papier ».
« La transformation, ce n’est pas juste la technologie, c’est aussi le changement des mentalités », souligne la ministre en entrevue avec notre Bureau parlementaire. « La nécessité créée par la crise a donné le “boost” nécessaire qui a fait que tous les acteurs du système se sont mis en mode solution », observe-t-elle.
Fin mars, un premier procès entièrement virtuel s’est déroulé dans un dossier de garde d’enfant à Trois-rivières. Juge, avocats, témoins et parties prenantes sont intervenus à distance. Depuis, les procès par vidéoconférence se multiplient au Québec.
De la même façon, la crise sanitaire a forcé le ministère à mettre en place un greffe numérique pour la Cour d’appel du Québec, en plus de permettre le paiement des frais judiciaires en ligne.
ARRÊT JORDAN
« On va sortir de la crise avec des avancées qui vont demeurer », estime Sonia Lebel.
Après tout, les restrictions liées à la COVID-19 risquent de demeurer en place encore « quelque temps » et le système de justice ne peut pas continuer d’accumuler des inventaires de dossiers non traités.
À terme, la numérisation de la justice permettra aussi de mieux respecter les délais imposés par l’arrêt Jordan, affirme Mme Lebel. Par exemple, les avocats des régions éloignées n’auront plus à perdre une journée pour venir déposer leurs dossiers.
Les procureurs, eux, pourront régler virtuellement les questions d’horaires avec le tribunal sans y consacrer une demi-journée sur place.
Mais les outils virtuels ont leurs limites. « Le procès devant jury, on n’est pas rendus là et ce n’est peutêtre pas le plus adapté », souligne la ministre.
Avant le confinement, les acteurs étaient « déjà autour de la table, affirme Mme Lebel, mais chacun avait ses craintes, chacun avait ses enjeux. » « La crise a eu pour effet positif de mobiliser les gens parce que c’était une question de nécessité immédiate », conclut-elle.