Acheter québécois : pas toujours simple
Fabriqué au Québec, achat local, commerce de proximité. Voici des expressions qu’utilise le gouvernement Legault pour nous inciter à acheter québécois en cette période de pandémie.
À l’heure où on rouvre les commerces, ce sera important de faire preuve de nationalisme économique.
Sauf que, le panier bleu est-il capable de répondre aux besoins de tous les Québécois ?
UN PRIVILÈGE
Se procurer localement des produits qui sont entièrement conçus et fabriqués ici relève, pour la plupart des biens de consommation, de l’utopie.
C’est bien d’encourager un magasin qui a pignon sur rue près de chez soi, sauf que, si le magasin en question vend des objets majoritairement fabriqués en Chine, est-ce qu’on vient vraiment de gagner au change ?
Oui, on encourage un petit commerçant, ce qui est primordial, mais on engraisse aussi cette mondialisation qui est en partie responsable de la crise que l’on traverse.
Pour certaines industries, c’est quasiment impossible d’être 100 % fait au Québec. Prenons l’exemple des vêtements. On aura beau concevoir et coudre notre linge ici, le tissu qu’on utilisera sera presque immanquablement tissé dans un pays Asie.
La question socioéconomique n’est pas non plus à négliger. Je suis privilégiée. Il est relativement facile pour moi de payer un peu plus cher par conviction.
Ça ne me dérange pas d’acheter de l’ail québécois même s’il est trois fois plus cher que celui qui a poussé en Chine.
J’ai les moyens de me payer une robe conçue ici, même si elle coûte 50 piasses de plus que celle Made in Bangladesh.
Mais soyons réalistes, est-ce qu’un parent monoparental ou une personne à faible revenu hypothéquera sa capacité à payer le loyer ou à se nourrir pour consommer québécois ?
Ça m’étonnerait. Et c’est plus que compréhensible.
Est-ce qu’on est réellement prêt à payer plus cher un produit parce qu’il est fait chez nous dans la conjoncture économique actuelle ?
Beaucoup de gens ont perdu leur emploi. Le taux de chômage explose.
Dans ce contexte, c’est normal de compter ses sous et de privilégier l’économie plutôt que l’économie. C’est juste humain.
C’est plate, mais en ce moment, et plus que jamais, pour le consommateur, money talks.
UN CHANGEMENT S’IMPOSE
Chacun devra faire son gros possible, donc, et mettre l’épaule à la roue dans la mesure de son pouvoir d’achat et de la disponibilité des produits.
Peut-être serait-il temps, même si ça fait des années qu’on le répète, d’acheter moins, d’acheter mieux et de réutiliser nos affaires, de les passer au suivant. Mettons la pédale douce sur la consommation.
La question de la temporalité se pose, aussi. Au début, tout le monde fera preuve de bonne volonté.
C’est la crise, après tout.
Acheter québécois sera une priorité pour plusieurs d’entre nous.
Mais au bout d’un an ou deux, est-ce que cette volonté fléchira?
L’histoire démontre que l’homme a la mémoire courte. Et que le porte-monnaie l’emporte habituellement sur les idéaux.