Le Journal de Quebec

Après 25 ans de traque, le présumé « financier » arrêté

Félicien Kabuga était l’un des principaux accusés encore en fuite

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PARIS | (AFP) Classé parmi les fugitifs les plus recherchés au monde, le financier présumé du génocide rwandais Félicien Kabuga a été arrêté hier matin près de Paris et écroué après vingt-cinq ans de cavale, ouvrant la voie à un procès devant la justice internatio­nale.

Âgé de 84 ans, M. Kabuga, qui résidait à Asnières-sur-seine (région parisienne) sous une fausse identité, est notamment accusé d’avoir créé les milices Interahamw­e, principaux bras armés du génocide de 1994, selon L’ONU.

Visé par un mandat d’arrêt du Mécanisme internatio­nal (MTPI), la structure chargée d’achever les travaux du Tribunal internatio­nal pour le Rwanda (TPIR), il était l’un des principaux accusés encore en fuite avec Protais Mpiranya, qui commandait la garde du président rwandais Juvénal Habyariman­a, et l’ex-ministre de la Défense Augustin Bizimana.

M. Kabuga est notamment mis en accusation pour « génocide », « incitation directe et publique à commettre le génocide » et « crimes contre l’humanité (persécutio­ns et exterminat­ion) ».

Félicien Kabuga a été incarcéré hier soir, a appris L’AFP de source judiciaire. Il doit être présenté au procureur général de Paris dans les prochains jours.

S’ensuivra une procédure d’extraditio­n devant la chambre de l’instructio­n de la cour d’appel de Paris, qui décidera de sa remise au Mécanisme internatio­nal à La Haye pour qu’il y soit jugé.

APPELS AUX MEURTRES

En 1994, M. Kabuga appartenai­t au cercle restreint du président rwandais Juvénal Habyariman­a dont l’assassinat, le 6 avril 1994, allait déclencher le génocide.

Il présidait la tristement célèbre Radio télévision libre des Mille Collines (RTLM), qui diffusa des appels aux meurtres des Tutsis, et le Fonds de défense nationale (FDN) qui collectait « des fonds » destinés à financer la logistique et les armes des miliciens hutus Interahamw­e, selon l’acte d’accusation du TPIR.

Il est également accusé d’avoir « ordonné aux employés de sa société [...] d’importer un nombre impression­nant de machettes au Rwanda en 1993 », avant de les faire distribuer en avril 1994 aux Interahamw­e.

« TRÈS DISCRET »

Ce sont les gendarmes de l’office central de lutte contre les crimes contre l’humanité (OCLCH) qui ont mené l’opération ayant conduit à l’arrestatio­n, samedi à 6 h 30 locales (4 h 30 GMT), dans un immeuble résidentie­l d’une rue pavillonna­ire d’asnières. Félicien Kabuga se trouvait alors avec un de ses fils, qui n’a pas été interpellé.

« C’était un vieux monsieur qui avait du mal à marcher. Il vivait là depuis trois ou quatre ans. C’était quelqu’un de très discret. Il ne parlait pas, il marmonnait quand on lui disait bonjour », a déclaré Olivier Olsen, président du syndic de l’immeuble.

Réfugié en Suisse en juillet 1994 avant d’être expulsé, Félicien Kabuga avait ensuite temporaire­ment rejoint Kinshasa. Il avait été signalé en juillet 1997 à Nairobi, où il avait échappé à une opération destinée à l’arrêter, puis à une autre en 2003, selon L’ONG spécialisé­e TRIAL.

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PHOTO AFP Sur cette photo prise le 8 avril 2019, une femme portant son enfant regarde le mur des noms des victimes alors que le Rwanda marquait la 25e commémorat­ion du génocide de 1994 au Mémorial du génocide de Kigali.
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FÉLICIEN KABUGA Financier présumé du génocide

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