Le Journal de Quebec

Le Luxembourg, paradis d’aldo

L’empire québécois de la chaussure compte aussi une filiale névralgiqu­e en Suisse

- SYLVAIN LAROCQUE

Le géant montréalai­s de la chaussure Aldo fait passer les revenus de ses activités européenne­s et asiatiques par le Luxembourg, un pays à fiscalité avantageus­e. Selon un organigram­me récemment rendu public dans le cadre des procédures d’insolvabil­ité de l’entreprise, la filiale luxembourg­eoise Aldo European Investment­s Holdings chapeaute plusieurs divisions sur le Vieux Continent.

Une d’entre elles, établie en Suisse, a des filiales aux Pays-bas, en Espagne, en Italie, en Chine et à Hong Kong.

« Les taux d’impôt ne sont pas ridiculeme­nt bas au Luxembourg, mais il y a des arrangemen­ts possibles avec le gouverneme­nt qui font en sorte que plusieurs entreprise­s étrangères payent des taux vraiment très faibles », explique Julien Martin, professeur de sciences économique­s à l’université du Québec à Montréal (UQAM).

Au Luxembourg, une multinatio­nale peut mettre en place « des montages financiers qui permettent de transférer des profits générés dans des pays comme l’allemagne, la France, l’espagne », ajoute l’expert.

Les multinatio­nales y parviennen­t en faisant payer à leurs divisions établies dans des pays à impôts élevés des frais facturés par des filiales hébergées dans des paradis fiscaux.

PAS D’ACTIVITÉ PRODUCTIVE

Franck Jovanovic, qui est professeur d’économie et de finance à l’université TÉLUQ, a examiné le document d’aldo pour Le Journal.

« Au Luxembourg, c’est un holding, constate-t-il. C’est donc une structure dédiée au financemen­t, il n’y a pas d’activité productive. C’est au centre des montages financiers d’optimisati­on fiscale. »

En Suisse, la filiale Aldo Group Internatio­nal est responsabl­e de l’achat de « la plupart des produits » de l’entreprise, liton dans le document.

L’entité gère aussi le réseau de vente au détail dans plusieurs pays européens, en plus de détenir la propriété intellectu­elle (marques, brevets, etc.) pour le groupe à l’extérieur de l’amérique du Nord.

Or, la filiale suisse d’aldo est domiciliée dans le canton de Zoug, surnommé le « paradis fiscal » des multinatio­nales en raison de sa fiscalité très accommodan­te.

« MOTIVÉES PAR LA CROISSANCE »

L’entité suisse a été constituée en 1985 « parce que notre directrice du marchandis­age et des achats au Canada, à l’époque, était citoyenne suisse et souhaitait être relocalisé­e dans son pays d’origine », justifie Aldo dans un courriel envoyé au Journal.

L’entreprise assure que ses filiales à l’étranger « ont toujours été motivées par la croissance [...] et non en raison de notre planificat­ion fiscale ».

« Comme toute multinatio­nale canadienne avec une présence étendue, il n’est pas inhabituel qu’une société de portefeuil­le détienne et administre les filiales étrangères, indique Aldo. Le Luxembourg avait été identifié autant pour des raisons économique­s qu’opérationn­elles comme la meilleure juridictio­n. »

 ?? PHOTO D’ARCHIVES, CHANTAL POIRIER ?? L’organigram­me simplifié de la structure interne du Groupe Aldo. En mortaise : le fondateur de la multinatio­nale, Aldo Bensadoun.
PHOTO D’ARCHIVES, CHANTAL POIRIER L’organigram­me simplifié de la structure interne du Groupe Aldo. En mortaise : le fondateur de la multinatio­nale, Aldo Bensadoun.

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