Le Journal de Quebec

Une famille brisée dans l’ombre

Son personnifi­cateur, Claude Boulianne, avait des doutes 3 ans avant l’annonce de 1995

- STÉPHANE CADORETTE

Dans les semaines menant au 25 mai 1995, les rumeurs entourant le potentiel déménageme­nt des Nordiques faisaient de plus en plus de bruit. Mais déjà, trois ans auparavant, quelqu’un savait pertinemme­nt que ce lourd dossier se tramait loin des projecteur­s. Le nom de cette source extrêmemen­t bien informée : Badaboum!

Non, la mascotte bien-aimée des Nordiques n’était pas un agent double. Du moins, pas au sens strict du terme.

C’est que lorsque Claude Boulianne n’enfilait pas l’uniforme du sympathiqu­e lourdaud bleu, comme il l’a si bien fait pour le bonheur des petits et grands de 1986 à 1992, il agissait entre autres à titre de chauffeur privé pour nul autre que le grand patron, Marcel Aubut.

Dans un monde idéal, M. Boulianne aurait préféré continuer de divertir la galerie jusqu’à la toute fin, en 1995. Or, trois ans plus tôt, des bribes d’informatio­ns qu’il entendait derrière le volant l’ont mené à conclure que le navire prenait l’eau.

« J’ai décidé d’arrêter de faire Badaboum quand j’ai commencé à comprendre que l’équipe allait déménager un jour. Je n’étais pas nécessaire­ment dans le secret des dieux, mais j’entendais des choses.

« J’avais énormément de plaisir à faire ce que je faisais, je ne l’ai jamais fait pour l’argent, mais quand tout te laisse croire que l’équipe va partir et que tu es marié avec des enfants, tu penses à ta sécurité d’emploi », lance après toutes ces années celui qui a poursuivi sa carrière dans un rôle d’acheteur à l’université Laval.

UN HOMME DISCRET

L’histoire aura donné raison à Claude Boulianne. Trois ans après ses soupçons, les Nordiques quittaient Québec. Même après près de trois décennies de recul, celui qui campait le célèbre Badaboum ne révèle qu’un bout du mystère.

« Je ne dirai pas tout ce que j’entendais, et Marcel ne disait pas tout devant moi de toute façon. Je n’étais pas bilingue, mais j’arrivais à comprendre des bouts de conversati­on en anglais. Je me questionna­is. Coudonc, ils pourraient vraiment partir ?

« Ce sont des informatio­ns que j’ai toujours gardées entre moi et ma conjointe. Même mes proches n’ont jamais été au courant. Le hockey au Québec, ç’a toujours été fragile », assure-t-il.

AUCUN REGRET

C’est son frère Raymond, un autre fidèle employé de la première heure des Nordiques, qui l’a incité à se transforme­r en Badaboum quand les Nordiques ont ouvert la porte à une mascotte en prévision de Rendez-vous 87.

Jamais une seconde Claude Boulianne n’a regretté de s’être prêté au jeu, même s’il a choisi de se tourner vers une autre avenue avant la fin.

« Quand les Nordiques sont partis, en 1995, j’étais évidemment triste, mais je voyais venir ça depuis longtemps. Ça faisait mal au coeur quand même parce que j’avais toujours espoir qu’un acheteur local vienne sauver l’équipe.

« J’ai eu tellement de plaisir dans cette période de ma vie, mais je ne vis pas dans la nostalgie. Les années ont passé et j’ai souvent entendu des gens dire que, supposémen­t, Badaboum c’était eux. J’ai toujours laissé faire ça. »

Mascotte et chauffeur… Quand on vous dit que chez les Nordiques, tout le monde faisait un peu de tout !

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PHOTOS DIDIER DEBUSSCHÈR­E ET D’ARCHIVES 1. Claude Boulianne n’enfile plus le costume, mais le toutou préféré des amateurs de hockey de Québec, le cher Badaboum qu’il personnifi­ait, n’est jamais loin de lui. 2. et 3. Notre homme a personnifi­é la mascotte de 1986 à 1992. 1
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