Le Journal de Quebec

Cinq contrats à une firme non autorisée

Québec a utilisé ses pouvoirs pour permettre à une entreprise de continuer à décrocher des contrats

- ÉRIC YVAN LEMAY

Québec vient de permettre à une entreprise dont des dirigeants ont été impliqués dans des histoires de financemen­t politique troubles de continuer des travaux d’agrandisse­ment d’hôpitaux, même si elle n’avait plus son autorisati­on d’obtenir des contrats publics.

Créée après la commission Charbonnea­u, l’autorité des marchés publics joue le rôle de chien de garde pour s’assurer de l’intégrité des entreprise­s qui font affaire avec le gouverneme­nt. Celles qui ont un contrat de constructi­on dépassant 5 millions $ au provincial doivent détenir une autorisati­on de contracter.

En décembre dernier, Constructi­on T.E.Q. a perdu cette autorisati­on après ne pas l’avoir renouvelée. Or, elle a obtenu un passe-droit du Conseil du trésor pour continuer ses contrats pour l’agrandisse­ment de l’hôpital du Sacré-coeur, de la future urgence de l’hôpital Fleurimont à Sherbrooke et de celle de Maisonneuv­e-rosemont.

Dans un geste rarissime, le Conseil a utilisé une clause de la loi pour lui permettre de poursuivre ses travaux sans avoir d’autorisati­on et sans savoir quand elle l’obtiendrai­t. Cette décision datant de février a été rendue publique dans la Gazette officielle du Québec le 20 mai.

UNE PREMIÈRE

Or, deux des dirigeants de T.E.Q. sont d’anciens cadres chez Snc-lavalin. L’un d’entre eux a été mêlé à un scandale de financemen­t politique du Parti libéral du Canada et du Parti conservate­ur. Sans compter que le fondateur de T.E.Q et ancien haut dirigeant, Emmanuel Triassi, a attiré l’attention de l’unité permanente anticorrup­tion (UPAC) dans l’enquête Mâchurer sur le financemen­t au Parti libéral du Québec.

Selon des documents consultés par notre Bureau d’enquête, un participan­t à une soirée de financemen­t a même indiqué que Triassi, décédé en avril dernier, lui avait demandé d’apporter entre 5000 $ et 10 000 $ en argent liquide.

À la Société québécoise des infrastruc­tures, qui chapeaute les travaux des trois hôpitaux, on indique que c’est la première fois qu’une telle demande est faite au Conseil du trésor.

On justifie cette décision pour ne pas retarder les travaux ou de crainte qu’il n’y ait pas d’autres soumission­naires intéressés.

IL NE SAVAIT PAS

Le vice-président des affaires juridiques de Constructi­on T.E.Q., Gérard Pierre, a soutenu qu’il ignorait que le Conseil du trésor avait utilisé des pouvoirs spéciaux pour permettre à l’entreprise de continuer ses travaux.

Il n’était pas non plus au courant des histoires de financemen­t politique. Il indique qu’une nouvelle demande d’autorisati­on a été faite en janvier et qu’une réponse est attendue sous peu.

C’est un changement dans la direction de l’entreprise qui aurait entraîné des délais.

Dans le cadre d’une telle demande, le dossier de l’entreprise doit faire l’objet de vérificati­ons de la part de L’UPAC, ce qui aurait été effectué il y a deux semaines.

Me Pierre indique que L’UPAC a demandé certains documents supplément­aires à la maison-mère de l’entreprise, Astaldi, basée en Italie. Cette dernière a connu d’importants problèmes financiers l’an dernier.

 ??  ?? Constructi­on T.E.Q. a obtenu plusieurs contrats publics, dont cet agrandisse­ment de l’hôpital du Sacré-coeur.
Constructi­on T.E.Q. a obtenu plusieurs contrats publics, dont cet agrandisse­ment de l’hôpital du Sacré-coeur.

Newspapers in French

Newspapers from Canada