Le Journal de Quebec

Une coupe historique à Rimouski

Le 28 mai 2000 à Halifax, l’océanic battait sans équivoque les controvers­és Colts de Barrie 6-2 pour s’emparer De l’emblème de la suprématie du hockey junior canadien

- KEVIN DUBÉ

La LHJMQ a vu passer dans ses rangs des équipes dominantes qui ont marqué l’histoire. De toutes celles-là, c’est l’océanic de Rimouski de 1999-2000 qui a été désignée la meilleure des 50 premières saisons du circuit par un vote populaire tenu il y a deux ans. Il y a 20 ans presque jour pour jour, le 28 mai 2000, cette formation dirigée par Doris Labonté mettait la main sur la Coupe Memorial. Retour sur le parcours de la meilleure équipe de l’histoire de la LHJMQ.

À sa cinquième saison d’existence, l’océanic visait déjà les grands honneurs. L’équipe comptait dans ses rangs son joueur vedette, Brad Richards, auteur de saisons de 115 et 131 points à ses deux premières années dans la LHJMQ, ainsi que le talentueux Européen Juraj Kolnik, le leader et capitaine Jonathan Beaulieu et le gardien Sébastien Caron.

Après un début de saison à la hauteur des attentes, l’océanic décide de se faire discrète sur le marché des transactio­ns. Rimouski met la main sur le défenseur de 20 ans Alexandre Tremblay en provenance de Cataractes de Shawinigan ainsi que sur Shawn Scanzano des Huskies de Rouyn-noranda.

« On était assez low profile, se souvient l’entraîneur-chef et directeur général de l’équipe à l’époque, Doris Labonté. Après la période d’échanges, tout le monde disait qu’on était les grands perdants et que les favoris étaient maintenant Québec et Moncton. On ne nous voyait pas gagner. J’ai donc décidé de jouer le jeu en disant dans les médias que même si on était premiers, ça ne voulait rien dire parce que des équipes comme Québec et Moncton étaient beaucoup plus fortes à ce moment. On voulait continuer d’être sous-estimés. »

La stratégie a fonctionné puisque malgré le fait que les Remparts aient fait l’acquisitio­n de Mike Ribeiro et les Wildcats celles de Mathieu Benoit et François Beauchemin notamment, c’est l’océanic qui a terminé au premier rang du classement général avec 102 pts, devant Québec et Moncton (96 pts) ainsi que les Mooseheads de Halifax (93 pts) qui, eux, recevaient le tournoi de la Coupe Memorial en mai.

DÉFIS DE TAILLE

Sa conquête du trophée Jean-rougeau, remis à la meilleure équipe en saison régulière permet ensuite à l’océanic d’obtenir un laissez-passer directemen­t au deuxième tour éliminatoi­re où il fait finalement face aux Mooseheads qu’il élimine en quatre parties. Il vient ensuite à bout des Wildcats en cinq rencontres pour obtenir, en grande finale, un rendez-vous avec les Olympiques de Hull. Encore une fois, malgré une défaite dans le deuxième match causée par un but de Michael Ryder en prolongati­on, l’océanic l’emporte en cinq pour gagner la première coupe du Président de son histoire.

« Tu vis beaucoup d’émotions quand tu gagnes la coupe du Président, mais tu dois rapidement remettre la pendule à zéro. C’était la force de notre équipe, on était capable de gérer nos émotions », se remémore Michel Ouellet qui n’avait que 17 ans à l’époque.

LES BONS GARS

Les émotions ont toutefois pris le dessus, à l’arrivée de l’autocar de l’équipe à Halifax.

« Quand on est arrivés, je ne sentais pas les gars super confiants. Ils étaient nerveux, se souvient Labonté. On savait qu’on affrontera­it des adversaire­s très puissants. Quand on a traversé le pont, le coeur battait fort. On voulait gagner et on sentait une pression de bien faire. »

Parmi les adversaire­s présents, nuls n’étaient plus redoutable­s que les Colts de Barrie, champions de la Ligue junior de l’ontario. Menés par l’actuel entraîneur des Maple Leafs de Toronto, Sheldon Keefe, qui avait terminé au premier rang des pointeurs de L’OHL, les Colts étaient une équipe bâtie dans le moule du bon vieux hockey physique et intimidant. Leur arrivée à Halifax s’était déroulée dans la controvers­e après, notamment, qu’ils eurent quitté le traditionn­el banquet de début de tournoi avant la fin et qu’ils eurent refusé de se placer sur la ligne bleue lors de la cérémonie d’ouverture, préférant plutôt continuer

de patiner en rond dans leur territoire. Ils s’étaient plus tard vu décerner une amende de 5000 $.

L’un de leurs meilleurs joueurs, Mike Jefferson, avait conclu la saison régulière avec 203 minutes de pénalité en 53 matchs de saison régulière, puis en avait ajouté 107 en 23 parties éliminatoi­res. Pour ceux dont le nom sonne une cloche, il a ensuite changé son nom pour Mike Danton, et, après quelques saisons dans la LNH, il a été reconnu coupable de complot pour meurtre à l’endroit de son ancien agent, David Frost, et condamné à sept ans et demi de prison en novembre 2004.

« Je me souviens que la première fois qu’on est arrivés à l’aréna, c’était Barrie qui pratiquait. On avait regardé ça un peu et ça n’a pas été long qu’on s’était dit qu’on ne devait pas se laisser distraire. Qu’on devait demeurer en contrôle », se rappelle quant à lui le capitaine Jonathan Beaulieu.

LA FINALE ATTENDUE

L’océanic est fidèle à sa réputation dès le départ de la compétitio­n. La troupe de Doris Labonté termine au premier rang du tournoi à la ronde pour accéder directemen­t à la finale. Les Colts, que l’océanic avait battus 7-2 lors du tournoi à la ronde, les ont ensuite rejoints grâce à une victoire en prolongati­on contre les hôtes, les Mooseheads d’halifax.

La veille du grand match, Jefferson déclare dans un quotidien de Halifax que Brad Richards est un joueur surestimé et qu’il ne « parviendra­it pas à jouer plus de cinq matchs dans L’OHL ».

Le match ultime ne débute pas nécessaire­ment comme l’océanic l’aurait espéré. Dominé 16-8 aux lancers en première, Rimouski parvient à se retirer au vestiaire avec une égalité de 0-0 grâce au brio du gardien Sébastien Caron.

« Entre la première et la deuxième, je suis resté dans le corridor. Je n’étais pas content. Les gars n’essayaient même pas. On aurait dit que les gars avaient gelé, ils avaient les pieds dans le ciment. Mon adjoint Donald Dufresne m’a dit que je devrais aller le leur mentionner, et après hésitation, c’est ce que j’ai fait. Tout ce que j’ai dit, c’est qu’on devait au moins essayer », relate Labonté.

Au retour, l’océanic est méconnaiss­able.

Il inscrit quatre buts contre un seul en deuxième période et ne regardera plus derrière. Le brio de Richards, avec deux buts et deux aides, ainsi que celui de son acolyte Juraj Kolnik, permettent à l’océanic de l’emporter 6-2 et de mettre ainsi la main sur la Coupe Memorial.

« C’est comme si c’était la victoire des bons gars. Même David Branch [commissair­e de la LCH] avait dit à Jonathan Beaulieu en lui remettant la coupe qu’il était content que ce soit nous qui ayons gagné », se souvient Labonté.

Quant à Richards, il n’avait pas manqué de répliquer à Jefferson dans les médias.

« C’est sûr que ça m’a motivé, avait-il mentionné après le match. Quand un gars comme lui dit des choses comme ça, tu te demandes de quoi il parle. Maintenant, j’espère qu’il va se la fermer et se rappeler qui je suis. »

Et pas besoin de rappeler que Richards a pris les grands moyens pour qu’on s’en souvienne tous. Il a disputé 1126 matchs dans la LNH entre 2000 et 2016, remportant la Coupe Stanley avec le Lightning de Tampa Bay en 2004.

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 ?? PHOTOS D’ARCHIVES ?? 1. Le fondateur de l’océanic, Maurice Tanguay, derrière la coupe Memorial et trois joueurs de l’équipe ; Jean-françois Babin, Jean-phillippe Brière et le capitaine Jonathan Beaulieu. Ce dernier habite toujours à Rimouski. Quant à Brière, son nom sur le trophée a rejoint celui de son père Michel, vainqueur en 1971 avec les Remparts. À ce jour, ils demeurent le seul duo père-fils de la LHJMQ à avoir remporté le trophée. 2. L’équipe posant avec la coupe Memorial à Halifax. 3. L’entraîneur Doris Labonté et Maurice Tanguay lors du défilé à Rimouski. 3
PHOTOS D’ARCHIVES 1. Le fondateur de l’océanic, Maurice Tanguay, derrière la coupe Memorial et trois joueurs de l’équipe ; Jean-françois Babin, Jean-phillippe Brière et le capitaine Jonathan Beaulieu. Ce dernier habite toujours à Rimouski. Quant à Brière, son nom sur le trophée a rejoint celui de son père Michel, vainqueur en 1971 avec les Remparts. À ce jour, ils demeurent le seul duo père-fils de la LHJMQ à avoir remporté le trophée. 2. L’équipe posant avec la coupe Memorial à Halifax. 3. L’entraîneur Doris Labonté et Maurice Tanguay lors du défilé à Rimouski. 3
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