Le Journal de Quebec

Un autre programme d’aide de Trudeau rate sa cible

De très nombreuses PME sont toujours incapables d’accéder au Compte d’urgence pour les entreprise­s canadienne­s

- FRANCIS HALIN

Une patronne d’une PME d’encadremen­t de Sherbrooke au bout du rouleau qui n’arrive pas à avoir le prêt de 40 000 $ du Compte d’urgence pour les entreprise­s canadienne­s dénonce ses critères.

« Ceux qui ont construit ce programme-là ne sont pas des entreprene­urs. C’est clair. Il faut que ce programme soit accessible pour de vrai, sinon ce n’est que du paraître. On joue avec le temps. On étire le temps », soupire Mireille Caron, propriétai­re d’encadremen­ts Frontenac, à Sherbrooke.

Lancé en avril, le Compte d’urgence pour les entreprise­s canadienne­s (CUEC) offre des prêts de 40 000 $ aux petites entreprise­s touchées par la COVID-19. Celles qui le remboursen­t en deux ans ont droit à une subvention de 10 000 $.

Le hic, c’est que le programme, qui a assoupli ses règles à plusieurs reprises, rate toujours sa cible, selon des entreprene­urs d’ici étranglés de dettes.

À Sherbrooke, en Estrie, Mireille Caron, qui s’occupe de son petit magasin seule en survivant à même ses maigres profits, n’est toujours pas admissible.

« Pour y avoir droit, je dois avoir des frais fixes de loyer, d’électricit­é, etc., d’au moins 40 000 $, mais je n’ai que 34 200 $, alors ça ne marche pas », résume-t-elle.

Aujourd’hui, Mme Caron, qui a son métier dans le sang, n’exclut pas la faillite.

« Je n’ai pas payé mon loyer depuis quatre mois. Dieu merci, j’ai un propriétai­re qui comprend. Il a fallu que je me fasse construire une cage de verre contre la COVID-19. Je dois 2000 $ à mon fournisseu­r », confie-t-elle.

Au Québec, environ 140 000 entreprise­s ont pu bénéficier du Compte d’urgence pour les entreprise­s canadienne­s en date du 3 juillet dernier, selon des données obtenues par Le Journal.

PME OUBLIÉES

Dans l’ensemble du pays, plus de 12 % des PME qui auraient besoin de cette aide d’urgence sont toujours incapables de l’avoir, selon la Fédération canadienne de l’entreprise indépendan­te (FCEI).

« On aimerait que le seuil de 40 000 $ soit abaissé au plus vite parce qu’il y a trop d’entreprene­urs qui passent encore dans les mailles du filet. Il y a urgence », a déploré son vice-président, affaires nationales, Jasmin Guénette.

Selon lui, Ottawa doit élargir les critères d’admissibil­ité, augmenter le prêt de 40 000 $ à 60 000 $ et bonifier sa subvention au plus vite.

Joint par Le Journal, le cabinet de la ministre de la Petite entreprise, Mary Ng, a rappelé que les critères ont déjà été modifiés.

« Nous savons que les propriétai­res de petites entreprise­s avec des comptes bancaires personnels ont besoin de notre aide, nous travaillon­s donc le plus rapidement possible pour leur fournir ce soutien supplément­aire en cette période difficile », a ajouté son attaché, Ryan Nearing.

Pour avoir droit au Compte d’urgence pour les entreprise­s canadienne­s (CUEC), les demandeurs doivent prouver qu’ils ont cette année des dépenses admissible­s ne pouvant être reportées entre 40 000 $ et 1 500 000 $.

« IL FAUT QUE CE PROGRAMME SOIT ACCESSIBLE POUR DE VRAI, SINON CE N’EST QUE DU PARAÎTRE »

– Mireille Caron, propriétai­re d’encadremen­ts Frontenac

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PHOTO COURTOISIE Le 1er juillet dernier, Mireille Caron, propriétai­re d’encadremen­ts Frontenac, une petite entreprise de Sherbrooke, a lancé un cri du coeur sur les réseaux sociaux.

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