Des experts réclament une loi pour l’application COVID-19
La Loi d’accès à l’information est insuffisante pour protéger la population
Sans une loi particulière pour encadrer l’utilisation d’une application de traçage afin de lutter contre la COVID-19, un employeur ou un tiers pourrait forcer un citoyen à télécharger l’outil, craint la Commission d’accès à l’information du Québec.
La Loi d’accès à l’information, qui protège la vie privée des Québécois, est insuffisante pour protéger la population contre les dérives potentielles d’une application de traçage installée sur des téléphones intelligents.
Nos lois manquent de mordant pour faire face aux nouvelles technologies qui prennent de plus en plus de place dans nos vies, admet la présidente de la Commission d’accès à l’information (CAI), Diane Poitras.
« Certains enjeux ne sont pas couverts avec la loi actuelle », prévient-elle, surtout dans le cadre d’une application de traçage contre la COVID-19.
« Oui, il y a des employeurs qui pourraient forcer un employé à télécharger l’application », a-t-elle confirmé aux partis d’oppositions qui s’inquiètent.
Ainsi, afin d’éliminer les dangers pour la vie privée des citoyens, le gouvernement devrait adopter un cadre juridique spécifique.
Elle se contenterait néanmoins d’une modification par décret à la loi existante. De son côté, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse ne recommande pas l’adoption d’un tel outil pour contrôler la propagation du virus. Si Québec va de l’avant, l’organisation estime également qu’il faudra de nouvelles mesures législatives.
RISQUES DE SÉCURITÉ
Pour une deuxième journée de suite, les experts présents à la commission parlementaire ont vivement critiqué les applications de traçage pour stopper la propagation du virus, comme le manque de fiabilité, les lois défaillantes et le danger pour la vie privée.
Le professeur en informatique de L’UQAM, Sebastien Gambs, a été très sévère envers la technologie Bluetooth que compte utiliser le gouvernement.
Il a exposé ses risques de sécurité et vulnérabilité. « Le terme anonyme est un peu trop fort. Même si le risque de réidentification est faible, il existe encore. On pourrait tenter de suivre la trace de quelqu’un ou son téléphone », a souligné M. Gambs. Il ajoute que l’adresse IP lors du téléchargement est aussi enregistrée.
Pour sa part, le professeur Mourad Debbabi du comité consultatif en cybersécurité soutient que les risques de sécurité de la technologie Bluetooth sont très résiduels.
DE PLUS EN PLUS INQUIET
Par ailleurs, le degré de confiance des élus de l’opposition envers les applications de traçage est en chute libre depuis le début des auditions.
« On a entendu des experts, des groupes. Et, de notre côté, les inquiétudes s’accumulent en ce qui a trait aux risques associés à une éventuelle application », a affirmé Gabriel Nadeau-dubois, leader parlementaire du deuxième groupe d’opposition.