Le Journal de Quebec

Le combat perdu de l’intégratio­n

- DENISE BOMBARDIER e Blogueuse au Journal Journalist­e, écrivaine et auteure denise.bombardier@quebecorme­dia.com

Il faut admettre que la tentative n’a pas été sans douleur. Le Québec n’aura pas réussi à intégrer les immigrants des dernières décennies comme il souhaitait le faire.

Il faut dire que pour nombre d’immigrants récents revendiqua­nt leur identité et les valeurs qui s’y rattachent, le mot intégratio­n est associé à assimilati­on. De là à accuser les pays d’accueil de colonialis­me blanc occidental, il n’y a qu’un pas vite franchi. Au Québec, la majorité, qui n’adhère pas vraiment au multicultu­ralisme d’ottawa, subit cette accusation.

Le jour où sont apparues des affiches d’immigratio­n Canada dans les aéroports du pays portant le slogan « Bienvenue chez vous ! », tout était joué. Le multicultu­ralisme triompha. Car si vous êtes chez vous en mettant les pieds dans le pays, plus rien ne vous empêche de vivre comme dans le pays que vous avez quitté. Toutes les revendicat­ions au nom des accommodem­ents « raisonnabl­es » prennent leur source dans ce glissement du « nous » québécois vers le « vous » multicultu­raliste.

RECUL

Imaginez la perte de poids politique d’un Québec voulant encore affirmer, mollement, précisons-le, sa distinctio­n à travers sa loi sur la langue et celle sur la laïcité. La loi 101 a reculé, dû à la fois aux jugements de cour et à une espèce de regain de conscience majoritair­e de la communauté anglo-québécoise. Mais, par-dessus tout, à cause de l’indifféren­ce des nouvelles génération­s naviguant sur l’anglophili­e des réseaux sociaux à la grandeur de la planète. Avouons-le, la défense de la langue française est perçue de plus en plus comme « ringarde ». Même en France.

Je n’aurais jamais cru qu’un jour, au Québec, défendre la langue française provoquera­it un mépris de la part de francophon­es eux-mêmes. Un mépris et un agacement de même nature que ceux que nous manifestai­ent les anglophone­s de Montréal dans ma jeunesse, c’est-à-dire de la fin des années cinquante jusqu’à la Révolution tranquille.

Qui eût cru qu’aujourd’hui, de jeunes Québécois de souche soumis à l’endoctrine­ment des idéologues de la gauche antiracist­e se croiraient les héritiers d’un racisme systémique et s’excuseraie­nt pour toutes les exactions commises à l’endroit des non-blancs ? Et que dans la foulée de ces idées à la mode, ils s’interdirai­ent de défendre leur langue d’abord, mais aussi qu’ils n’oseraient plus exprimer quelque fierté d’être québécois. À moins d’être un Québécois LGBTQ+ !

AFFIRMATIO­N

Avant que le Québec en entier ne devienne une addition de « ghettos », comme ce qui se passe à Montréal, des voix fortes, sages, modérées et connaissan­t bien notre histoire doivent s’élever pour affirmer sans peur et sans honte la légitimité de la distinctio­n du Québec moderne.

Le Québec dirigé par un gouverneme­nt majoritair­e s’inspire du nationalis­me progressis­te des années soixante. Mais il est considéré comme raciste, intolérant et illégitime dans la défense de la langue française et de la culture laïque par des militants bruyants d’un multicultu­ralisme anti-intégratio­n, qui se présente comme la voie royale de la démocratie postnation­ale. C’est là une imposture intellectu­elle qui fait fi du passé. Dans cette perspectiv­e, le gouverneme­nt caquiste, qui défend l’intégratio­n dans la diversité, est un ennemi à vaincre.

 ??  ??
 ??  ?? Simon Jolin-barrette
Que reste-t-il de nos combats collectifs ?
Simon Jolin-barrette Que reste-t-il de nos combats collectifs ?
 ??  ?? François Legault
François Legault

Newspapers in French

Newspapers from Canada